Divergence de stratégie chez les leaders

© Javier Sanso / Acciona

En choisissant d’opter pour une option radicale au sud, Jean-Pierre Dick joue le rôle du chien dans un jeu de quilles. Pour la première fois depuis Madère, les choix stratégiques prennent le pas sur la course de vitesse. Entre sérénité affichée et interrogations perceptibles, chacun tente de faire bonne figure.

Sacrée Sainte-Hélène ! Il n’est pas né le Dom Juan qui saura calmer ses caprices. Ses hautes pressions et ses dorsales invasives jouent avec les nerfs des navigateurs. En cause actuellement, la traversée d’une zone de calmes, consécutive au développement de la dorsale vers l’ouest. Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec 3) a choisi d’attaquer d’emblée dans le sud, n’hésitant pas à mettre de l’ouest dans sa route par instants. Objectif pour le navigateur niçois, rejoindre au plus tôt les régimes perturbés qui circulent au delà du 30° sud. Le changement de trajectoire de Jean-Pierre a inspiré visiblement François Gabart (MACIF) qui a choisi de suivre le mouvement, quand Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) a décidé de rester au nord de cette bande mouvante, au risque de venir s’enfoncer dans les molles de l’anticyclone.

Podium à bascules

Ces changements de trajectoires font, tout au moins provisoirement, l’affaire d’Alex Thomson (Hugo Boss) et de Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) qui gagnent chacun une place au classement. En distance au but, Jean-Pierre Dick régresse logiquement au classement en s’éloignant de la route directe. Mais cela ne semble pas l’affecter, bien au contraire. En prenant l’initiative, le skipper de Virbac-Paprec 3 se débarrasse d’une pression qu’il reporte sur ses adversaires : être dans l’action est encore le meilleur des moyens d’éviter la gamberge. C’est sûrement ce que doit penser Jean Le Cam (SynerCiel) qui, depuis plusieurs jours, a choisi délibérément de plonger sous le vent de Mike Golding (Gamesa) et Dominique Wavre (Mirabaud). Cette option, Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) aurait bien aimé la faire sienne. Mais handicapé par ses réparations de voile, le navigateur suisse a été contraint de serrer le vent et n’a pas pu s’éloigner de la bordure de l’anticyclone autant qu’il l’aurait voulu. Comme quoi, des pépins techniques d’apparence mineure peuvent avoir parfois des conséquences d’envergure à plusieurs jours d’intervalle.

Les mers du Sud en tête

Plus à l’arrière encore, Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered), Tanguy de Lamotte (Initiatives-Cœur), Arnaud Boissières (AKENA Vérandas) et Bertrand de Broc (Votre Nom autour du Monde avec EDM projets) profitent des alizés pour filer bon train dans l’hémisphère sud. Et pourtant, certains voudraient déjà tourner la page. Bertrand de Broc, deux tours du monde dans les pattes, troquerait bien l’indolence paisible des alizés pour un menu autrement plus corsé. « Les mers du sud, c’est bien pour ça qu’on est venu ? ». Comme quoi l’expérience n’empêche pas de rester légèrement déraisonnable. Mais sans ce grain de folie, qui voudrait faire le tour de la planète mer en solitaire ?

Classement au 27/11 – 16h06

  1. Armel Le Cléac’h
    [ Banque Populaire ]
    à 19519,1 milles de l’arrivée
  2. Alex Thomson
    [ Hugo Boss ]
    à 166,6 milles du leader
  3. François Gabart
    [ MACIF ]
    à 174,5 milles du leader
  4. Bernard Stamm
    [ Cheminées Poujoulat ]
    à 227,2 milles du leader
  5. Jean Pierre Dick
    [ Virbac-Paprec 3 ]
    à 273,6 milles du leader

Ils ont dit

Bertrand de Broc (FRA, Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets)

Les conditions de navigation sont plutôt clémentes. Il y a toujours un vent d’est avec un peu de mer. On est assez pressé d’avoir des navigations un peu plus perturbées. J’attends un petit peu plus de rythme, comme tous les concurrents. La navigation dans les alizés, c’est un peu longuet. La situation est un peu compliquée que ce soit à l’est ou à l’ouest. J’ai envie de trouver mon rythme, faire corps avec mon bateau et essayer d’aller vite parce que ce sont des machines extraordinaires.

Vincent Riou (FRA, PRB)

Je fais route depuis deux jours en direction du Brésil. On est au ralenti, ça permet de réfléchir, de digérer tranquillement. Il y a un moment où il va falloir passer à autre chose. Heureusement on est encore dans l’action. Je pense déjà à comment ramener le bateau du Brésil. Je ne sais pas encore si je vais faire le convoyage du bateau mais j’aimerais autant le ramener. Mais, comme beaucoup de marins, j’ai une double casquette (de naviguant et de chef d’entreprise, ndlr). Il se peut que j’ai des obligations qui m’empêchent de le ramener.

Jean-Pierre Dick (FRA, Virbac Paprec 3)

Ça se passe bien pour l’instant. La mer n’est pas très agitée et il n’y a pas beaucoup de vent mais ça va revenir. C’est vrai qu’on attend le vent… Dans ce genre d’option, il y a toujours un peu de conviction personnelle, ce n’est pas simple. Depuis le début au large du Brésil, je m’étais plutôt positionné pour une stratégie plutôt ouest. C’est très difficile de se faire un jugement sur une option comme ça mais on va voir ce que ça va donner ; ça vaut le coup.

Armel Le Cléac’h (FRA, Banque Populaire)

Tout va bien. On avance doucement vers la porte des glaces. Il faut essayer de trouver le meilleur chemin possible. La météo n’est pas simple devant. On n’est jamais sûr de son coup. Ce sont des aléas. J’ai choisi une route un peu plus nord, c’est ma stratégie actuelle. Il ne faut pas changer d’option pour s’aligner avec les autres, c’est souvent l’erreur. Depuis deux jours on a pris des choix différents. C’est intéressant de voir les différentes trajectoires. On verra ce que ça donnera mais je ne pense pas que le Vendée Globe va se jouer ici.

Bernard Stamm (SUI, Cheminées Poujoulat)

Il y a beaucoup de rotations de vents et beaucoup de zones sans vent et ce n’est pas simple. Je suis dans une position médiane qui n’est pas simple. Je ne sais pas encore quand je vais monter dans le mât. Je me vois mal m’arrêter maintenant pour grimper. Ce sera sûrement après la dorsale parce qu’après il y aura des vents un peu plus forts et donc la possibilité de mettre des voiles un peu plus petites. Il faut rester dans le bon wagon et là, je ne suis pas très bien placé. Je ne suis pas très content de là où je suis.

Source

Liliane Fretté Communication

Liens

Informations diverses

Sous le vent

Au vent

Les vidéos associées : 2012-13

Les vidéos associées : IMOCA

Les vidéos associées : Vendée Globe