Des histoires de minutes

  • ©  François Van Malleghem
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Depuis l’éclatante victoire de Sébastien Simon, hier en milieu de matinée, les arrivées de la Bermudes 1000 Race Douarnenez – Brest se succèdent. Et si l’on a assisté à un incroyable dénouement entre les 2e, 3e, 4e et 5e places qui se sont jouées dans un intervalle de six minutes et des poussières, le finish n’a pas été moins haletant pour les accessits avec, là-aussi, des rebondissements de dernière minute. Pour preuve, le duel entre Fabrice Amedeo (Newrest – Art & Fenêtres) et Clément Giraud (Envol by Fortil) a tourné à l’avantage du premier pour seulement deux petites minutes tandis que Damien Seguin (Groupe APICIL) a pris le dessus sur Manuel Cousin (Groupe Setin) dans les 30 derniers milles pour finalement s’imposer avec un bonus de onze minutes sur son adversaire. Des écarts infimes qui témoignent parfaitement de l’intensité de la course. Une course qui est cependant loin d’être finie puisqu’il reste, à cette heure, encore quatre solitaires en mer.

« Le scénario météo faisait que ça revenait par derrière, ce qui a favorisé les rebondissements. Je savais qu’avec mon positionnement au Nord, en attaquant, il y avait moyen de gratter trois places sur la fin. J’y suis parvenu », a commenté Fabrice Amedeo (Newrest – Art & Fenêtres) qui a effectué une jolie remontée depuis le passage du waypoint des Açores (et la perte de son J3), et qui s’est finalement octroyé la 7e place, grillant sur le fil Clément Giraud (Envol by Fortil). « Finir deux minutes et 27 secondes derrière Fabrice, c’est un peu rageant, mais c’était vraiment une super course ! », a commenté le Toulonnais qui a plutôt bien tiré son épingle du jeu pour sa première épreuve sur le circuit IMOCA, en solo de surcroît. « On a vraiment fait un super match avec Stéphane Le Diraison, Fabrice Amedeo et Arnaud Boissières. Ça a été super stimulant d’être constamment au contact », a ajouté le navigateur. Même son de cloche du côté du skipper de la Mie Câline – Artipôle. « C’est resté très incertain jusque dans les derniers milles. On était vraiment cinq dans un mouchoir, et on n’avait pas vraiment idée de l’ordre dans lequel ça allait finir. Pour ma part, j’ai un peu merdé avant le Fastnet. Je suis parti tout seul sur un bord vers l’ouest et en fait ça n’a pas été un bon coup du tout. Après ça, il a fallu trouver les moyens de revenir au score. Je suis un peu déçu de ma 9e place mais je suis quand même content de finir devant Stéphane (Le Diraison) », a déclaré Boissières qui a devancé son ancien concurrent du Vendée Globe de 34 minutes. Un écart, là encore, relativement dérisoire au terme d’un parcours de 2000 milles. Même topo ou presque pour Manuel Cousin (Groupe Setin) et Damien Seguin (Groupe APICIL) que seules onze minutes ont séparé sur la ligne.

« Toutes les sorties bonnes à prendre »

« C’est bien d’avoir commencé la saison par une course comme celle-ci. Pour nous, c’était déjà un challenge d’être au départ car le bateau a été mis à l’eau à peine quinze jours avant le début de la course. Le but était de terminer et de prendre un maximum d’infos sur la machine. L’objectif est rempli » a commenté le double champion paralympique de 2.4 mR. « Dès qu’on navigue sur ces bateaux on apprend quelque chose, toutes les sorties sont bonnes à prendre ». Sûr que c’est aussi ce que pourront déclarer les quatre marins toujours en mer depuis l’arrivée, ce samedi à 16h05, de la Britannique Miranda Merron (Campagne de France) en 13e position. Les prochaines ETA ? Celles d’Alexia Barrier (4myPlanet) et de Pip Hare (Superbigou) prévues aux environs de 21 heures puis de 2 heures. Il faudra en revanche être plus patient pour les deux suivants, Ari Huusela (Ariel II) et Denis Van Weynbergh (Eyesea). Les deux marins qui ferment la marche de cette Bermudes 1000 Race Douarnenez – Brest, composent toujours avec de petits airs erratiques, ce qui complique grandement leur progression vers la pointe Bretagne. Le hic, c’est que leur situation, et en particulier celle du skipper Belge, ne va pas s’améliorer des masses d’ici à l’arrivée puisque la zone de vents faibles qui s’étend sur leur route va remonter en même temps qu’eux. « C’est un bon entraînement pour le Pot-au-Noir », a déclaré avec pragmatisme, Denis Van Weynbergh, qui, pour mémoire navigue avec un ris dans sa grand-voile depuis la rupture de son lashing de têtière de grand-voile. Dans ce contexte, il n’est pas attendu à Brest avant mercredi après-midi.

Ils ont dit :

Fabrice Amedeo (Newrest-Art & Fenêtres) 7e:

« Une course pleine de rebondissements pour moi ! J’ai eu des pépins techniques car le bateau a été mis à l’eau tardivement, une semaine avant la course. La principale mésaventure c’est l’amure de J3 qui a lâché. La voile est partie à l’eau. C’était un peu chaud car le câble de J3 est structurel, il permet de tenir le mât. 36 heures après je suis monté dans le mât pour solutionner le problème et pouvoir renvoyer des voiles de tête. Je termine quand même 7e, à peu près à ma place sur le papier. Je suis quand même un peu frustré car si je n’avais pas eu ces problèmes j’aurais pu faire mieux… Le contrat est rempli, j’ai fait une belle course, appris plein de choses. C’est de bon augure pour la suite. J’ai trouvé cette course géniale, le scénario météo faisait que ça revenait par derrière, ce qui favorisait les rebondissements. Quand j’avais un problème j’arrivais plus ou moins à revenir. J’ai quasiment tout le temps navigué au contact de concurrents. Je savais qu’avec mon positionnement au Nord, en attaquant, il y avait moyen de gratter trois places sur la fin. J’y suis parvenu. Sur cette course j’ai fait des sessions à 25 nœuds pendant de longues minutes, avec des accélérations à 28 nœuds. C’est la première fois que j’attaque aussi fort aussi longtemps avec ce bateau. C’est super excitant ! »

Clément Giraud (Envol by Fortil) 8e:

« J’ai fait la Mini Transat il y a 15 ans et j’ai navigué en professionnel pour des gens pendant des années en tant que numéro 1. Là, j’avais comme ambition d’avoir tous les rôles et j’ai eu la sensation de faire du VOR en solitaire ! Je me suis régalé et c’est moi qui prenais les décisions ! J’ai la chance d’avoir un super compagnon parce qu’il est agréable à la barre, agréable en sensations et agréable à vivre. Que ce soit dans les petits airs ou dans les conditions un peu plus soutenues, il se comporte bien. On a fait 7000 milles ensemble en deux mois et demi, ce qui n’est pas rien, et je commence à sentir quand je lui tire un peu trop dessus. C’est top d’arriver à avoir cette connivence avec l’engin.»

Arnaud Boissières (La Mie Câline – Artipôle) 9e :

« Ce genre de parcours, c’est super intéressant. On a été plusieurs bateaux à se batailler et on a navigué pas mal à vue. C’est le genre de situation idéale pour apprendre à performer avec la machine donc c’est chouette. Ce qui est bien c’est qu’on a utilisé toute la garde-robe du bateau et surtout, on s’est fait deux bords de runs intéressants pour voir à quelle vitesse pouvait aller le bateau. La conclusion c’est qu’il va bien mais en revanche, il mouille un peu. Il va falloir améliorer un peu le confort mais globalement, c’était vraiment super. C’est toujours bien de faire du solo. Ça permet vraiment de se mettre dans le bain du Vendée Globe. A mon sens, on n’en fait jamais assez en course. »

Stéphane Le Diraison (Time for Oceans) 10e :

« La montée en Irlande a été très intéressante, avec du près du portant, un peu de tactique et beaucoup de contact. On va dire que le début de course a été engagé et très exigeant. La descente vers le waypoint des Açores s’est joué dans une autre ambiance. Ca a plus ressemblé à une course de sangliers. Pendant 24 heures, ça a bien secoué. Ensuite, on a eu une petite accalmie puis la même pour remonter. C’était vraiment fatiguant mais je suis content de la nav que j’ai effectué par rapport aux objectifs que je m’étais fixé. Il y avait notamment tout un tas de choses autour du sommeil que je devais tester pendant cette course et tout ça a vraiment été bien. Je sors avec un certain nombre d’enseignements sur moi et sur le bateau. Maintenant, il va falloir travailler pour aller pus vite. Le parti pris, c’était de ne pas faire de modifications cette année pour bien savoir ce que j’allais faire. Maintenant je pense que c’est assez clair. »

Damien Seguin (Groupe APICIL) 11e :

« C’est bien de commencer la saison par une course comme celle-ci. Pour nous c’était déjà un challenge d’être au départ car le bateau a été mis à l’eau à peine 15 jours avant le début de la course. Le but était de terminer et de prendre un maximum d’infos sur le bateau. L’objectif est rempli. Dès qu’on navigue sur ces bateaux on apprend quelque chose, toutes les sorties sont bonnes à prendre. Le bateau a bien évolué cet hiver, c’était important de se mettre dans le bain du solitaire. A un moment donné il faut lâcher les outils, arrêter de bricoler sur le bateau et aller naviguer. Suite à la casse de la têtière je me suis retrouvé pendant 30 heures sans grand-voile. Il a fallu se faire violence pour monter en haut du mât. Ce n’était pas facile, je suis content car je me suis prouvé que j’en étais capable, ce qui est plutôt bien dans l’optique du Vendée Globe. »

Manuel Cousin (Groupe Setin) 12e :

« Il y avait un double enjeu sur la Bermudes 1000 Race : décrocher le meilleur résultat possible et engranger les milles qualificatifs pour le Vendée Globe. J’ai eu un problème au niveau du flasque de la tête de quille qui s’est arraché, je ne pouvais plus anguler la quille. C’est un super parcours, j’ai l’impression d’être parti hier, c’est passé à une vitesse incroyable. On voit l’Irlande, on imagine les Açores. C’est hyper physique, un long sprint, tu n’arrêtes pas ! J’ai fait beaucoup plus de préparation physique cet hiver et je l’ai vachement senti car j’arrive plutôt en forme à Brest ! »

Miranda Merron (Campagne de France) 13e :

« Je suis partie sans connaitre le bateau du tout. J’avais seulement fait un convoyage de nuit et une transmanche à bord. Faire 2000 milles en solo lors de cette course a forcément été une très bonne manière de le découvrir ! On a eu de tout en termes de conditions, et ça a été vraiment bien, mais j’ai encore beaucoup à apprendre, notamment sur le range des voiles. J’avais déjà l’expérience de l’IMOCA, mais c’était presque au siècle dernier ! (Rires) Je suis ravie d’être arrivée. Le but, c’était vraiment de terminer la course. Il y eu du bon et du moins bon et j’ai des progrès à faire mais je suis ravie. Globalement je me suis fait plaisir. A un moment, trois oiseaux sont rentrés dans le bateau, le pilote a auto-viré, mon thé s’est renversé alors que j’étais en train de prendre un ris… J’ai fini rincée. Là, je me suis dit que le Vendée Globe se méritait vraiment ! »

Classement :

1. Sébastien Simon (Arkéa – Paprec) arrivée le 17 mai à 10h34 après 7 jours 17 heures et 34 minutes de course ; 2. Yannick Bestaven (Maître Coq) à 3h13 du premier ; 3. Giancarlo Pedote (Prysmian Groupe) à 3h15 ; 4. Sam Davies (Initiatives Cœur) à 3h18 ; 5. Maxime Sorel (V and B – Sailing Together) à 3h19 ; 6. Boris Herrmann (Malizia) à 3h53 ; 7. Fabrice Amedeo (Newrest – Art & Fenêtre) à 7h29 ; 8. Clément Giraud (Envol by Fortil) à 7h31 ; 9. Arnaud Boissières (La Mie Câline – Artipôle) à 8h38 ; 10. Stéphane Le Diraison (Time for Oceans) à 9h13 ; 11. Damien Seguin (Groupe APICIL) à 14h48 ; 12. Manuel Cousin (Groupe Setin) à 14h59 ; 13. Miranda Merron Campagne de France) à 1j 05 h47.

Toujours en mer à 18 heures :

14. Alexia Barrier (4myPlanet) à 36,6 milles de l’arrivée ; 15. Pip Hare (Superbigou) à 187,1 m ; 16. Ari Huusela (Ariel II) à 33,4 m; 17. Denis Van Weynberg (Eyesae) à 556,6 m. (17 inscrits)

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