Isabelle Joschke ambassadrice des 24h du sport féminin

© BTh.Martinez/Sea&Co

Ambassadrice de la 2e édition des 24h du sport féminin, qui aura lieu le samedi 24 janvier, Isabelle Joschke, 37 ans, a réussi à se faire une place dans l’univers très masculin de la course au large. Avec l’objectif de défendre la mixité, en mer et sur terre.

« Quand j’ai démarré la voile, je n’ai rencontré aucune barrière parce que j’étais une femme. J’ai été bien accueillie, j’ai même trouvé un sponsor assez rapidement. Nous n’étions vraiment pas nombreuses, mais j’étais persuadée que les choses allaient évoluer. Si j’avais réussi, pourquoi les autres n’y arriveraient-elles pas ? Mais, ce fut l’inverse. Plus le niveau augmentait, moins il y avait de femmes. »

Isabelle Joschke

Je veux prouver qu’il est possible d’être une femme et d’aller au bout de ses rêves

Une association pour promouvoir la mixité

Face à ce constat, Isabelle Joschke n’a pas baissé les bras. Bien au contraire. Après une année d’absence faute de sponsor, elle a fait son retour l’an dernier, au départ de sa sixième Solitaire du Figaro, avec un nouveau sponsor, Generali, et une nouvelle ambition : promouvoir la mixité. Pour cela, elle a cofondé l’association « Horizon Mixité » (1). « Notre but est de participer au changement des mentalités dans tous les domaines de la société », explique la jeune femme, aujourd’hui installée à Lorient. « Notre idée n’est pas de se cantonner au milieu de la voile. La voile, ce n’est qu’un point de départ ! Nous aimerions ainsi lancer prochainement un bus pédagogique avec des ateliers et une exposition itinérante pour toucher les écoles et le grand public lors de festivals ou de courses. »

Dernière initiative en date de l’association : participer à la campagne « HeForShe », lancée par l’actrice Emma Watson à l’ONU. « Nous avons voulu apporter notre petite pierre à cette action planétaire », souligne Isabelle Joschke. De Laurent Bourgnon à Franck Cammas en passant par Alain Gautier et Michel Desjoyeaux, vingt-neuf marins ont déjà répondu à notre appel en posant devant l’objectif du photographe Thierry Martinez. » Leurs portraits ont été exposés lors du Salon Nautique qui s’est déroulé à Paris en décembre dernier. Horizon Mixité souhaite par la suite les rassembler sur un poster tiré à 1000 exemplaires pour inviter les jeunes des clubs de voile à s’engager comme leurs idoles. Plus d’une centaine de salariés de Generali, son sponsor, se sont également mobilisés, pancartes #HeforShe à la main. Première entreprise française à soutenir ce mouvement international, Generali confirme ainsi son engagement en faveur de la mixité et de l’égalité hommes-femmes. Un engagement qui se retrouve, entre autres, dans L’Observatoire des femmes et de l’assurance et dans la Charte Sport responsable (2), deux projets dont l’entreprise est l’initiatrice.

Il était donc logique pour Isabelle Joschke de soutenir les 24h du sport féminin, et d’en être une ambassadrice. « Je suis très fière de représenter la course au large et d’être aux côtés de sportives de renom. Il est indispensable que nous, les sportives, nous nous emparions du sujet », insiste-t-elle. « Les freins à la féminisation de la voile sont les mêmes que dans d’autres disciplines. Il y a de réelles difficultés à concilier vies professionnelle et personnelle, entre autres quand se pose la question de la maternité. C’est une vraie injustice ! Il y a aussi certaines femmes qui n’osent pas se lancer dans des compétitions, faute notamment de modèles féminins. Par mon parcours, je veux prouver qu’il est possible d’être une femme et d’aller au bout de ses rêves. Les jeunes filles pensent trop souvent que la course au large, ce n’est pas pour elles. Ce n’est pas vrai. Malgré la difficulté physique, les femmes y réussissent aussi bien que les hommes.»

La voile, une passion découverte sur le tard

La carrière d’Isabelle Joschke en est la preuve. Née d’un père allemand ingénieur informaticien et d’une mère française professeur d’allemand, elle a grandi entre la région parisienne et la région de Genève. La voile, elle la découvre lors de vacances en famille sur des lacs en Autriche alors que personne n’en fait dans son entourage. Après son Bac, elle s’oriente vers des études littéraires sans avoir de métier précis en tête. Elle décide alors de suivre un stage de voile aux Glénans, en Bretagne : « Ça m’a pris du jour au lendemain. J’en ai fait un, puis deux… Je me suis retrouvée au large, sous le crachin, avec deux mètres de creux et un vent de force 5. Et j’ai trouvé ça génial. J’ai tout de suite accroché. Je me suis sentie vivante. »

Lors de sa Licence de lettres, elle embarque, en plein milieu d’année, comme équipière sur un voilier. Direction le Brésil. Ce voyage d’un mois et demi lui confirme sa passion. « Ce fut une révélation », résume-t-elle. « J’étais toujours dans l’action et, en même temps, je passais des journées entières à regarder l’horizon, complètement coupée du monde, en pleine nature. J’avais tout de même emporté des livres pour bosser mes partiels ! Au retour, ce fut une évidence : il fallait que je termine mes études et que je me lance dans le monde de la voile. » Isabelle se forme au monitorat à l’école de voile des Glénans, obtient sa Maîtrise de lettres et passe deux brevets, l’un pour devenir éducateur sportif, l’autre skipper.

Elle voyage, fait des rencontres qui vont changer sa vie : « A Lorient, j’ai fait la connaissance de personnes, dont deux femmes, qui participaient à la Mini Transat, en solitaire, sur un monocoque de 6,50 m. L’aventure qu’ils vivaient m’a parue incroyable. J’ai commencé à envisager de la tenter moi-aussi ». Elle s’installe à Marseille, avant d’embarquer sur des voiliers aux Antilles et aux Etats-Unis. Le métier de skipper lui permet de mettre de l’argent de côté pour s’acheter, en 2004, son premier bateau. « Mon père m’a aidée à acheter une camionnette », confie-t-elle en rappelant que ses parents l’ont toujours soutenue. « Il est venu chercher mon voilier avec moi, sous la neige, pour le déplacer de Rotterdam en Bretagne. Une vraie aventure ! » Isabelle participe à ses premières courses au printemps et obtient rapidement de bons résultats : « J’ai tout de suite pris goût à la compétition, cela vous pousse à dépasser vos limites et à vous donner à fond. »

Des résultats prometteurs

Dès sa deuxième saison, en 2005, elle trouve des sponsors et se lance dans une traversée de l’Atlantique sur le circuit Mini 6,50. « J’ai connu une grosse avarie dès la première étape, je n’avais plus de pilotage automatique, j’ai dû barrer 22 heures sur 24 ! », se souvient-elle. Loin de se décourager, elle finit 5e de la seconde étape, et 14e au classement général. Elle retente l’expérience deux ans plus tard et, cette fois, remporte la première étape de la course. Mais le vrai tournant de sa carrière reste sans conteste son passage dans la classe Figaro Bénéteau (monocoque de 10m). En 2008, elle prend pour la première fois le départ de La Solitaire et termine 3e bizuth. L’an dernier, pour sa 6e participation, Isabelle décroche la 16e place; elles ne sont alors que deux femmes (pour trente-six hommes) à concourir. Elle espère faire encore mieux cette année.

« Ma force, c’est ma détermination et mon engagement, estime la jeune femme qui a comme adversaire des hommes affichant parfois le double de son poids. Je navigue trois ou quatre jours par semaine. Après la journée en mer, nous passons une heure à débriefer. Je dédie ensuite un ou deux jours à la préparation du bateau et à des cours théoriques, par exemple sur la météo. J’ai aussi trois à cinq séances par semaine de préparation physique. Un peu plus quand je ne navigue pas. J’essaie de m’accorder des temps de repos pour me ressourcer. J’ai alors toujours un livre à portée de main ! »

Comme beaucoup de marins, Isabelle rêve de jour pouvoir s’engager un jour dans une autre course mythique : le Vendée Globe. En attendant, Isabelle Joschke espère qu’être une femme qui réussit dans le monde de la voile ne sera bientôt plus quelque chose d’extraordinaire : « J’aurais gagné quand ce sera devenu banal, que les femmes seront des skippers comme les autres aux yeux des journalistes et du grand public. ». Ce sera assurément l’une de plus belles victoires de cette sportive engagée qui ne lâche jamais rien.

(1) Avec la journaliste Martine Gauffeny https://www.facebook.com/horizon.mixite et https://twitter.com/horizonmixite

(2) http://www.generation-responsable.com/

Le palmarès d’Isabelle :

2014

  • 16ème de la Solitaire du Figaro
  • 7ème de la Solo Lorient Horta

2008 – 2012

  • 5 participations à la Solitaire du Figaro
  • 2 participations à la Cap Istanbul :
    1ère de la troisième étape en 2008
    2ème de la cinquième étape en 2010
  • 9ème de la Transat BPE 2009
  • 3ème de la Transmanche 2010

2007

  • Vainqueur de la première étape de la Transat 6,50 Charente-Maritime/Bahia
  • 2ème du Grand Prix d’Italie
  • Vainqueur du Mini Pavois
  • Vainqueur de la Pornichet Select 6.50
  • 2ème du Trophée Marie-Agnès Péron
  • 3ème de la Transgascogne

2006

  • 2ème du Trophée Marie-Agnès Péron
  • 2ème de l’Open Demi Clé
  • 4ème des Sables-Les Açores- Les Sables

2005

  • 14ème de la Transat 6.50 (5ème de la seconde étape)
  • 4ème de la Transgascogne

Source

TB Press

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Mis à l'eau le: 23 janvier 2015

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