Ne pas perdre le nord au sud ?

© Mathieu Claveau

Stratégie à long terme ou tactique rapprochée ? Les deux mon capitaine. Compétition océanique oblige, au Nord comme au Sud de l’Atlantique, les équipages engagés sur la Route du café doivent pour la plupart jouer sur les deux tableaux. Et chaque jour se creuser à nouveau les méninges pour ajuster leur trajectoire afin de gagner des milles et du terrain sur les petits copains. C’est d’autant plus vrai aujourd’hui, alors que la menace de devoir composer avec des alizés perturbés se confirme.

« C’est assez changeant, cette nuit on a même eu à un moment une panne de vent ; et là c’est reparti. Le vent est aussi changeant en direction, ce n’est pas toujours facile à suivre, on ne se retrouve pas toujours avec la bonne voile », explique Xavier Macaire en tête de flotte de la Class40 à bord de Groupe SNEF. Un premier signe qui ne trompe pas : il y a des perturbations dans l’air et dans le flux d’alizés qui risque de prendre du plomb dans l’aile au passage d’un système dépressionnaire sur l’Atlantique, générant une zone sans vent dans son sud.

DES ALIZÉS AGITÉS
Pas étonnant que dans ce contexte, la course prenne ce lundi matin de nouveau une tournure favorable à des séparations de trafic et des divergences dans les choix de route. « C’est chouette d’être remonté dans le paquet de tête avec Ambrogio (Alla Grande Pirelli) et Alberto (IBSA), on s’est bagarré bord à bord avec eux, parfois on a perdu, parfois on a gagné. C’est presque un peu triste de voir nos routes qui se séparent, mais on va assumer notre idée, notre stratégie. Elle sera peut-être payante, ou pas. Mais, c’est une possibilité pour gagner ; et on va saisir cette opportunité-là », poursuit le leader au classement, bien décidé à faire le choix de la route nord. « Quant à Amarris, qui est au-dessus de nous, on ne sait pas si on part sur la même route. On verra dans quelques heures… »

Suspense, suspense alors qu’aux avant-postes de la flotte, les cinq premiers progressent avec un écart d’une trentaine de par rapport au but. Ce qui n’est rien par rapport au décalage latéral de 160 milles qui sépare ce matin, Crédit Mutuel, très rapide au nord et les deux bateaux menés par des marins transalpins, positionnés plus au sud. Plus en arrière, notons aussi, la belle progression, en haut du plan d’eau d’Influence 2, 13e, qui remonte en force. D’après le classement de 8h, il a parcouru 319 milles sur les dernières 24 heures, contre 278 pour son sistership Alla Grande Pirelli, pourtant bien mené depuis le début par le duo Beccaria-Andrieu.

Chez les IMOCA du sud, même topo, alors que depuis plus de 24 heures, les conditions d’alizés ont été favorables à une remontée dans le classement par rapport aux “gens du nord”. Si Teamwork.net tient toujours la corde, cette option ne laisse aucun répit sur une trajectoire exigeante, où le moindre petit retard se paye cash. En témoigne la mésaventure de Groupe Dubreuil, qui en raison d’une déchirure dans sa grand-voile, a été forcé de ralentir hier la cadence pour réparer. Il voit ce matin les plus rapides des sudistes lui reprendre des places dans les premières lignes du classement.

D’autant qu’au sud, la régate stimulante qui anime les rangs serrés, permet aux équipages de tirer le meilleur de leur foiler. C’est en tout cas ce qu’est venu chercher Charal, qui a le premier emprunté la bretelle pour rejoindre l’autoroute des alizés, comme l’explique Jérémie Beyou : « stratégiquement, comme on était devant on a essayé de tirer toute la flotte dans cette option et de garder tout le monde avec nous pour avoir de la régate. Et sur ce plan là, on est servi, on essaye de tout donner pour gagner au bout ». Seule ombre au tableau de l’ancien leader, qui concède quelques milles sur ses plus proches concurrents aux avant-postes : une avarie de gennaker au passage de la dorsale anticyclonique. « Il s’est déchiré dans le foil relevé. On a donc abordé toute la descente des Canaries sans lui, pendant une vingtaine d’heures. Cela nous a un peu pénalisés. On a vu For People et Paprec Arkéa partir devant », raconte le complice de Franck Cammas.

Il convient aussi qu’il paye un peu les frais « d’un bord dans le nord, hier, qui n’a pas été super concluant. » Mais il en faut plus pour arrêter ce duo performant toujours bien placé dans cette régate océanique qui exige une concentration de tous les instants. « On a désormais un vent plus léger que les jours précédents, ce n’est pas évident de trouver le bon dosage pour faire de la droite et avoir suffisamment de pression pour que le bateau puisse voler », ajoute le copilote de Charal avec lequel on n’a malheureusement pas pu échanger plus longtemps, en raison des fortes perturbations sur la ligne.

SOLIDE SOLIDAIRES EN PELOTON
Enfin, chez les Ocean Fifty, le trio poursuit sa belle cavalcade océanique. Mais l’exercice est plus exigeant qu’il en a l’air, comme l’explique Thibaut Vauchel-Camus, solide leader à bord de Solidaires en Peloton : « la nuit est un peu longue. On s’impatiente, parce qu’on préfère gérer les grains de jour que de nuit, ce qui est moins sécurisant. On est toujours sur les routages, on est dans le rythme. On navigue propre, on s’occupe du bateau, de nous (…) Mais la régate n’est pas finie. 1 000 milles, c’est un petit quart du parcours, il peut se passer pas mal de choses : un gennak déchiré et très vite ça peut changer ; et dès lors que les poursuivants voient ça, ils ont le couteau entre les dents et essayent d’entrer dans la brèche, donc on fait attention. Pour l’instant, on progresse plus sur route météo que tactique, pour aller au plus vite sans chercher des conditions plus fortes que nécessaires, en essayant de s’affranchir des grains et de faire attention aux sargasses qui commencent à envahir le plan d’eau. On va essayer aussi d’arriver à une heure intelligente en Martinique, notamment pour que les photographes puissent faire de belles photos… » D’après les dernières estimations, il est attendu dans un peu plus de 48 heures, en fin d’après-midi, début de soirée sous les latitudes tropicales

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Transat Jacques Vabre

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