Six Ocean Fifty sur la Transat Jacques Vabre

© Vincent Olivaud

Ils seront six Ocean Fifty à prendre le départ de la Transat Jacques Vabre Normandie – Le Havre ce dimanche. En attendant le Jour J, chacun se livre sur le parcours, son équipage, ses appréhensions et l’exercice délicat d’une longue transat sur un multicoque de 15 m.

Un parcours long, semé d’embûches

Sébastien Rogues (Primonial), tenant du titre sur le même parcours, mais avec un nouveau bateau, ne voit aucune monotonie tant la route est variée : « La partie côtière est en général compliquée (Manche et Golfe de Gascogne) puis il faut gérer une transition entre la zone dépressionnaire et la zone anticyclonique pour approcher le Pot-au-Noir, plutôt aléatoire.
Ensuite, cela pourrait être plus simple pour descendre jusqu’à l’île de Fernando de Noronha, cela dépendra de la position de l’anticyclone de Sainte-Hélène. Enfin le long du Brésil un grand bord de vent arrière réclamera beaucoup de manœuvres. Le moment le plus tranquille sera la dernière portion vers la Martinique, quoique… un cyclone vient juste de passer sur l’arc antillais. On est donc loin du schéma classique d’une transatlantique par le sud de l’anticyclone des Açores ».
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Une femme à bord, ça change quoi ?

Il n’y avait pas eu de femme sur la Transat Jacques Vabre en Ocean Fifty depuis Karine Fauconnier (victorieuse en 2007). Erwan Le Roux (Koesio), le vainqueur de la dernière Route du Rhum, embarque cette année une pépite, Audrey Ogereau.
« J’ai navigué avec plusieurs femmes et à chaque fois j’ai remarqué qu’elles barraient super bien et qu’elles étaient capables, contrairement à moi, de faire deux choses en même temps : discuter stratégie et rester concentrée à la barre. Homme, femme, nous sommes complémentaires et nous formons de bons binômes. La plus longue navigation d’Audrey au large est de cinq jours. Pourtant, j’ai toute confiance. Elle est capable de gérer les situations de stress et je vais dormir sur mes deux oreilles. Audrey a du talent, une grosse capacité d’apprentissage. C’est une pépite… Et elle est très ouverte d’esprit, nous n’avons donc aucun sujet tabou ».

L’exercice périlleux d’une transat en multicoque de 15 m

Ils ne sont pas taillés pour un tour du monde, contrairement aux autres bateaux alignés dans le bassin Paul Vatine. Luke Berry (Le Rire Médecin – Lamotte), qui a déjà fait deux Transat Jacques Vabre en monocoque, décrit ce nouvel exer-cice délicat : « Traverser l’Atlantique en multicoque, c’est quand même un exploit ! Les Ocean Fifty sont volages et il faut être sur le qui-vive tout le temps pour ne pas dépasser le point de non-retour, contrairement aux monocoques, qui eux, reviennent à l’endroit. Les passages de front ne sont pas les plus risqués pour nous. On les voit arriver, on réduit, on fait attention. Les phases les plus périlleuses sont les périodes de vent instable, de grains, à l’arrière des fronts par exemple, ou dans la zone du Pot-au-Noir. Mais ce sont des bateaux tellement funs ! »
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La course en double, aussi exigeante qu’en solo

La course en double, moins fatigante qu’en solitaire ? Pas si sûr…. Thibaut Vauchel-Camus (Solidaires En Peloton) :
« On ne peut pas dire que le double est plus reposant que le solo. Il apporte de la sérénité quant à la veille et à la sécurité. Et certaines manœuvres sont beaucoup plus faciles à deux. Mais l’intensité physique est plus importante, on est plus souvent à fond. En double, quand tu vas dormir, le bateau garde un rythme très élevé et c’est donc peu confortable pour les nerfs et la qualité du sommeil ; en solo, tu décides seul quand tu vas dormir. En double, tu te cales aussi sur le rythme physiolo-gique de ton co-skipper. Il ne faut pas tomber dans la formule de politesse et il faut lui dire que tu dois aller dormir, même quand ce n’est pas ton tour ».

Dès le départ, un duo en trio

Les Ocean Fifty seront routés tout au long de la transat. L’équipier de l’ombre, à terre, apporte un peu de sérénité et contribue à la performance. Pierre Quiroga (Viabilis Océans) : « Nous formons un trio, notre routeur a le même rythme de vie que nous, l’humidité en moins.
Il nous permet de pousser un peu plus nos bateaux, de passer moins d’heures sur la stratégie. Nous sommes en contact H24, il est complètement intégré à l’équipage, mais il regarde plus loin que nous. Cela nous évite de rayer par erreur une page complète du livre. La confiance entre l’équipage et le routeur est indispensable. Nous travaillerons avec Dominic Vittet, nous nous connaissons parfai-tement. C’est un échange permanent, il nous dit ce qu’il envisage et nous lui décrivons ce que nous vivons, cela permet d’avoir une connaissance très fine de la situation et de la fiabilité des fichiers météo ».
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Entre trac et adrénaline, une appréhension légitime

Deux bateaux neufs, mis à l’eau l’été dernier, prennent le départ, Primonial et Realites. Si ces Ocean Fifty promettent de belles performances, leurs équipages abordent cette Transat Jacques Vabre avec une humilité légitime, à l’image de Fabrice Cahierc (Realites) : « Je n’ai pas d’appréhension quant aux conditions météo. Nous avons déjà affronté de fortes conditions avec le bateau, je suis confiant.

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En revanche, l’appréhension se situe au niveau de la casse, nous n’avons pas du tout envie de rentrer à la maison ! Alors nous faisons des doubles checks sur tous les éléments du bateau. J’ai toujours le trac avant un départ, j’ai peur de ne pas bien faire, c’est un mélange d’esprit de compétition et d’humilité. Pour gérer cela, je révise les instructions de course, la sécurité, je me plonge dans le parcours pour commencer à me mettre dans la course. Dès que la ligne sera franchie, ce trac se transformera en adrénaline. Nous sommes des compétiteurs ».

Ports d’attache des Ocean Fifty engagés sur la Transat Jacques Vabre
Saint-Malo : Viabilis Océans, Solidaires En Peloton, Le Rire Médecin-Lamotte, Realites
Pornichet : Primonial
La Rochelle : Koesio

Les engagés sur la Transat Jacques Vabre

  • Le Rire Médecin – Lamotte (Luke Berry – Antoine Joubert)
    Architecte : Guillaume Verdier, constructeur : JPS Chantier Larros
    Année de lancement : 2009
    Anciennement : Primonial (Sébastien Rogues), Réauté Chocolat (Armel Tripon), Actual (Yves Le Blevec).
  • Viabilis Océans (Pierre Quiroga – Ronan Treussart)
    Architecte : VPLP, constructeur CDK
    Année de lancement : septembre 2017
    Anciennement : Leyton (Sam Goodchild), Ciela Village (Thierry Bouchard)
  • Koesio (Erwan Le Roux – Audrey Ogereau)
    Architecte : VPLP, constructeur : Persico (Italie)
    Année de lancement : octobre 2020
  • Solidaires en Peloton (Thibaut Vauchel-Camus – Quentin Vlamynck)
    Architecte : Romaric Neyhousser, constructeur : NST
    Année de lancement : octobre 2020
    Anciennement Arkema 4 (Quentin Vlamynck)
  • Realites (Fabrice Cahierc – Aymeric Chappellier)
    Architecte : VPLP, constructeur CDK Technologies
    Année de lancement : juillet 2023
  • Primonial (Sébastien Rogues – Jean-Baptiste Gellée)
    Architecte : Romaric Neyhousser, constructeur Multiplast
    Année de lancement : août 2023

Source

Isabelle Delaune

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