Le grand chambardement !

© Pierre Bouras

Ian Lipinski et ses boys de Crédit Mutuel, Antoine Carpentier et Rémi Fermin ont réussi le gros coup de la nuit, s’emparant de la première place au détriment des valeureux italiens d’IBSA et d’Alla Grande Pirelli, pourtant insolents de domination depuis La Guadeloupe. Les Français, auteurs d’une journée à plus de 390 milles parcourus ces dernières 24 heures, ont su placer avec une diabolique précision leurs empannages dans les flux d’Ouest pour glisser à toute allure et dans des conditions particulièrement sportives, sous la petite dorsale qui vient ce matin bloquer leurs adversaires. L’apaisement du jour est accueilli avec soulagement par tous les équipages de tête, heureux de souffler un tantinet sur une mer moins casse-bateau. Le bilan comptable est largement à l’avantage de Crédit Mutuel qui s’est doté, à 650 milles de l’arrivée, d’un joli matelas de près de 45 milles d’avance.

Toilettes de chat !

La tête du classement du Défi Atlantique a ainsi connu un nouveau chamboulement, avec l’arrivée en fanfare d’un nouveau leader, Crédit Mutuel (Ian Lipinski). Rapides dans les flux d’Ouest, Ian et son équipage de costauds, Antoine Carpentier et Rémi Fermin, ont su attaquer à bon escient pour demeurer plus longtemps que leurs adversaires en bordure de l’anticyclone, parvenant à échapper aux griffes de la dorsale alanguie en leur Nord. « Ces 24 dernières heures, on a navigué sur la brèche, à la limite du bateau et des bonshommes » raconte Antoine Carpentier au sortir de cet épisode haut en figures de style véliques. Ils mettent fin à la superbe domination Italienne personnifiée par Alberto Bona (IBSA) et Ambrogio Beccaria (Alla Grande – Pirelli), bloqués par la dorsale dans leur tentative de gagner dans le sud. Une journée pascale débute, placée sous le signe de la transition pour les leaders, qui doivent aussi regarder du côté des Britanniques de Tquila. Brian Thomson et Alister Richardson ont poussé encore un peu plus loin l’option Sud de Crédit Mutuel. Ils étaient ce matin encore les plus rapides de la flotte, revenus à une poignée de milles du podium. La zone de transition du jour sera déterminante pour le duo Britannique. Et c’est Axel Tréhin, (Project Rescue Ocean), 5ème aux basques des Class40 Italiens, qui dépeint avec réalisme ces dernières 24 heures : « On vient de finir un joli run en avant du front, c’était ventilé, la mer était formée. On s’est bien rapprochés des Açores, c’était humide et pas hyper confortable. On en sort avec un bateau en bon état mais les marins apprécient ce retour au calme temporaire pour assainir l’ambiance à grand coups d’épongeage, de siestes et de toilette de chat.»

Journée de transition, avant le sprint final

Les équipages vont, passée cette transition peu ventée du jour, de nouveau entrer sous l’influence de l’anticyclone des Açores et des vents de Sud-Ouest de plus en plus soutenus. C’est en tribord amure qu’ils vont la nuit prochaine reprendre leur cavalcade au portant vers Faial et Horta, où les vainqueurs sont attendus dans la soirée de mardi. Le jeu demeure très ouvert, tant que la dorsale n’est pas totalement évacuée. Crédit Mutuel vient de prendre un sérieux ascendant psychologique en faisant parler la poudre de tonitruante manière. Une régate à quatre, voire plus dans l’archipel n’est pas à exclure, où les pièges inhérents aux sommets volcaniques de l’archipel pourraient jouer les juges de paix et désigner le vainqueur d’une étape pleine de contrastes et de chambardements.

Et aussi…

Des nouvelles de Jules Bonnier sur Nestenn – Entrepreneurs pour la planète (153), reparti hors course de Guadeloupe et qui cingle vers Horta, pour prendre partie à la seconde étape : « Tout va pour le mieux à bord de Nestenn – Entrepreneurs pour la Planète, les 48 premières heures ont été toniques et humide, on a fait 350mn en 24h entre le 7 et 8 mais l’état de la mer était pas top. Depuis on a entamé le contournement de l’anticyclone, beau temps, belle mer sous gennaker dans une petite quinzaine de noeuds. Le vent devrait revenir la nuit prochaine pour ne plus nous quitter jusqu’à Horta! »

Les mots du large :

Antoine Carpentier – Crédit Mutuel (158)

« Les conditions se sont enfin calmées, le bateau ne saute plus de vagues en vagues, la vie à bord redevient presque confortable, du coup on prend le temps de vous envoyer un message, c’est sympa, non ? De notre côté, tout va bien, pas de grosses blessures, quelques petits bleus mais rien d’anormal. Il faut dire que c’est bien violent comme sport, j’aurais dû faire de la boxe, c’est moins risqué. Bon, on ne vous cache pas qu’on a hâte d’arriver, de prendre une douche, de manger de la vraie nourriture. Ian va finir par me rendre malade avec ses plats lyophilisés… une bonne bière ! Bref la vie de terrestre quoi ! Côté carte postale, on a vu, enfin Rémi a vu une baleine alors qu’on était en pleine manoeuvre de changement de spi. J’ai fendu un banc de sardines qui, paniquées, se sont mises à sauter hors de l’eau, comme pour essayer de s’échapper devant un prédateur affamé, des levés et couchés de lune… Hier soir, on s’est fait un croisement un peu chaud avec Axel Tréhin… Les 24 dernières heures on a navigué sur la brèche, à la limite du bateau et des bonshommes. Je touche de la peau de singe on a rien cassé. On devrait avoir un petit répit de 24 heures avant de réattaquer comme des fous. »

Olivier Delrieu – Vicitan (134)

« Tout va bien chez nous. Grosse journée hier avec 6 ou 7 changements de voile et beaucoup de vent (jusqu’à 35nds) et une mer bien formée… J’ai révisé mes notions de barre sous spi et de départ au lof et au surf… Cette nuit : 10nds du 30°. RAS. Nuages, pas de lune, peu d’étoiles et il fait frisquet. Salutations pascales et planctoneuses! »

Jean Baptiste Daramy – Chocolat Pariès – Screb (123)

« Transition compliquée entre le Sud-Ouest et le Nord-Ouest, qui a surtout fini par être un vent du nord… En 36 heures, l’ambiance a bien changé, les paysages changeaient tout le temps… Après un début de nuit très compliqué, vent mal orienté, faible, courant… On était un peu au milieu de la piste, là nous sommes bien repartis dans un joli flux de Nord ! Un poil plus fort que sur les fichiers, mais ça, on ne va pas se plaindre… Par contre, qui dit flux de Nord, dit « Ca Caille ! » et c’est hyper humide… Pour des vacances à la mer, j’ai vu mieux…. Très bon dimanche de Pâques… C’est un peu dur de ne pas avoir de Chocolats de Pâques Pariès à bord… Mais ils auraient mal supporté le voyage, vivement mon retour au Pays Basque pour me rattraper… Bon atterrissage à Horta, on se voit en fin de semaine… D’ici là, on n’a pas fini de se faire des noeuds au cerveau pour trouver le meilleur chemin pour arriver à Horta! »

Mathieu Claveau – Prendre la Mer, Agir pour la Forêt (89)

« Tout va bien pour nous. Une belle journée à « spier » dans du 15 – 18 noeuds. Beaucoup d’heures à barrer pour exploiter au mieux le potentiel du bateau. La météo est complexe et les pièges nombreux. Cela ne va pas être facile de passer entre les mailles. Mais c’est ce qui fait tout l’intérêt du jeu ! A cette heure-ci, nous sommes toujours sous spi dans un vent plus léger et une mer belle, ça glisse tranquille ! Ciel étoilé…. »

Erwan Le Draoulec – Everial (177)

« Petit spi déchiré hier matin… Sinon tout le monde ok à bord ! »

Brian Thompson – Tquila (159)

« Tout va bien à bord. On croisé un navire de guerre Français hier. Il n’y a plus de poissons volants ni de méduses, et la mer est beaucoup plus froide. La nuit dernière, de nombreux dauphins bondissaient le long du bateau. »

Franz Bouvet – Yoda  (65)

« Après une superbe journée au soleil sous spi, une nouvelle nuit sans vent avec du crachin. »

Axel Tréhin – Project Rescue Ocean (162)

« Je vais essayer d’être un peu moins concis que dans le dernier mail, d’autant que les conditions s’y prêtent mieux ! (Je suis un peu sous pression, je vais essayer de pas écrire trop de bêtises. D’ailleurs est-ce le karma je ne sais pas, mais les routages lancés pendant la lecture des dernières news de la terre nous donnent une arrivée à 2h30 du mat, en plein dedans ! On navigue actuellement sous spi dans un vent d’ouest qui va progressivement tourner à droite pour nous faire finir… au près ! Autant la traversée de la haute pression et le tartinnage dans le vent de sud-ouest en avant du front le schéma paraissait clair, autant là c’est bien le bordel sur le plan d’eau… Concrètement, la problématique des dernières heures tient dans un choix assez cornélien, quand couper le fromage ? On vient de finir un joli run en avant du front, c’était ventilé, la mer était formée, on s’est bien rapprochés des Açores, c’était humide et pas hyper confortable. On en sort avec un bateau en bon état mais les marins apprécient ce retour au calme temporaire pour assainir l’ambiance à grands coups d’épongeage, de siestes et de toilette de chat. Je pense que désormais les dés ne sont pas loin d’être jetés, il y a de la route à faire mais en terme de placement, chacun a affirmé son choix face à la traversée du front. On est désormais dans ce que je vais nommer une zone de « transition merdique », en attendant l’arrivée du prochain front qui lui nous permettra d’arriver aux Açores. Dans cette ZTM, le vent est un peu en foutoir et ça patauge pour essayer d’aller dans la bonne direction avec une vitesse décente. On va même finir par faire du près ! Le choix cornélien était donc de trouver le bon endroit pour que ça ne soit pas la misère trop longtemps, et faire en sorte d’être pas trop mal placé en sortie pour le nouveau vent. Pour être honnête j’étais assez chaud à traverser tôt, voir d’entrée de jeu après le passage du premier waypoint, mais il s’agit également de gérer la prise de risque et les adversaires… Dans l’immédiat, parce que l’on n’a pas autre chose à faire de mieux, on s’applique à faire avancer le bateau de là où l’on est avec le vent que l’on a… Il y a 200nm de latéral entre Everial et Tquila, la situation est complexe mais le jeu est bien sympa ! Est-ce que l’archiviste va ressortir la tête de la cave et/ou est que l’ivresse de l’ex banquier suisse qui lui a fait oublier toute notion de neutralité va lui permettre de passer à la caisse ?
La réponse en image depuis vos canapés dans la journée. »

Dimanche 9 avril 2023 – Classement à 14h00 (heures françaises)

  1. Crédit Mutuel – Ian Lipinski à 665 nm de Horta
  2. Ibsa Group – Alberto Bona à 700 nm + 35 nm
  3. Allagrande Pirelli – Ambrogio Beccaria à 702,5 nm + 37,4 nm
  4. TQuila – Alister Richardson  à 704,4 nm + 39,4 nm
  5. Project Rescue Ocean – Axel Trehin  à 734,5 nm + 69,5 nm

Source

Grand Pavois Organisation

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Informations diverses

Mis à l'eau le: 9 avril 2023

Matossé sous: Class40, Course au Large, Défi Atlantique

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