Douleurs dorsales

© Alexis Courcoux

La route des alizés est semée d’embuches cet automne. Après une première semaine marquée par une succession de fronts plus puissants les uns que les autres, c’est maintenant une dorsale anticyclonique qui bloque les marins sur la route du sud. Pour l’heure, seul Actual est passé de l’autre côté du miroir. La flotte des Imoca s’est divisée entre ceux qui tentent de forcer la porte et ceux qui temporisent en gagnant dans l’ouest. Les Class 40 attendent leur heure.

246 milles : c’est la distance qui sépare maintenant Virbac-Paprec 3, solide leader de la course, de MACIF premier des Imoca sur la route du sud. C’est à dire près d’une vingtaine d’heures à rattraper alors que l’on s’approche petit à petit de la mi-course. En vingt-quatre heures, le petit groupe des bateaux ayant choisi l’option sud a perdu plus de 170 milles. Dans une telle situation, les concurrents tentent de faire contre mauvaise fortune, bon cœur. Les marins s’occupent ainsi à de multiples t&aci rc;ches ménagères : rangement du bateau, séchage des affaires de mer, brins de toilette compensent le manque de vent et la frustration de ne pas pouvoir avancer plus. Pendant ce temps, les hommes du nord progressent dans un vent d’ouest plus ou moins soutenu, moral en hausse, malgré l’inconfort de la navigation au près. Un équipage est particulièrement à la fête, celui de Bureau Vallée. Nelson et Louis Burton sont en train de déjouer les pronostics en pointant en cinquième position. Les deux frangins ont l’optimisme chevillé au corps et s’amusent visiblement beaucoup de bousculer la hiérarchie établie. A bord de Gamesa, Mike Golding a dû grimper en tête de mât pour remplacer les girouettes qui avaient été balayées par le coup de vent. Tout est maintenant sous contrôle…

Multi 50 : baignades açoriennes

En Multi 50, l’écart se creuse dangereusement entre Actual et Maître Jacques. Le premier caracole entre quinze et vingt nœuds dans ce qui ressemble de plus en plus à de l’alizé, quand le deuxième peine à s’extirper des calmes. Les deux Loïc prennent leur mal en patience. A la vacation de midi, quand le premier Loïc, Féquet, avait du mal à cacher son envie d’en sortir, le deuxième, Escoffier, envisageait une baignade autour du bateau et, en bon patron de pêche, regrettait de ne pas avoir embarqué une ou deux palangres. Quant à Franck-Yves, le père, de retour en France, il devra porter un corset pendant plusieurs sema ines après un diagnostic qui a révélé les fractures de deux apophyses et du sacrum. Les douleurs dorsales ne sont pas que météorologiques.

Class 40 : le podium encore incertain

Aquarelle.com continue son cavalier seul en tête de flotte. Derrière lui, Damien Seguin et Yoann Richomme profitent de leur belle option légèrement sous le vent de la flotte pour placer leur ERDF des Pieds et des Mains en deuxième position. Un bateau ancien mais bien optimisé, une navigation aux petits oignons, les deux marins démontrent que pour figurer aux avant-postes, une préparation bien maîtrisée est un excellent gage d’efficacité. Groupe Picoty s’est emp aré de la troisième place aux dépends de Phoenix Europ Express, mais la bagarre reste toujours aussi serrée. Pour l’équipe d’Avis Immobilier, la course est malheureusement terminée. Après la rupture d’une pièce d’étai qui les obligeait à faire escale à Ponta Delgada sur l’île de Sao Miguel, Eric Galmard et François Scheek ont eu le malheur de constater, en procédant à une inspection générale du bateau, qu’un des boulons de quille s’était sectionné. Il faudrait, pour pouvoir naviguer en toute sécurité, procéder maintenant à une sortie d’eau du bateau et engager des travaux de stratification pour remettre la quille en état. Un chantier trop complexe pour espérer reprendre la course dans les temps. Pour les concurrents de la Class 40, l&rsquo ;accalmie à venir sera, elle aussi, bienvenue.

Ils ont dit :

Loïc Fequet et Loïc Escoffier (Maître Jacques) : « On va être patient…»

Loïc Féquet :
« Ça irait mieux si on avait les conditions d’hier mais là on a zéro nœud… c’est le jeu. On s’ennuie et avec un Escoffier à bord, sans vent, il faut l’attacher à sa bannette car sinon il est impossible ! On va être patient, m ais Actual est parti par devant ; donc on verra bien. On a eu peu de souci à bord, une petite fuite de ballast et un petit problème de barre centrale, mais rien de compliqué ».
Loïc Escoffier :
« Si j’avais su, je me serais arrangé pour embarquer des palangres ! Il faut chaud, je suis en short, on a du savon pour l’eau de mer donc je pense aller faire un petit plongeon pour aller me laver. On met un bout, je plonge à l’avant du bateau et je remonte derrière… je ne vais pas aller faire un cent mètre non plus… »

Marc Guillemot (Safran) : “ On entend les voiles qui fasseyent”

« A l’intérieur, c’est un peu le bazar ; on fait un atelier séchage. Yann est allongé et dort profondément. On entend les voiles qui fasseyent, car il y a très peu de vent. La vache (Groupe Bel, ndr) n’est pas loin mais sourit moins, car elle est comme nous à chercher du vent. Il faut assumer le choix d’avoir traversé cette zone anticyclonique en sachant qu’on peut se faire avoir. Il ne faut pas casser le matériel et rester très vigilant car le gréement est très sollicité avec des à-coups secs qui pourraient tout abimer. On est déterminé à sortir de cette zone mais ça peut être dans 50 milles. A 50 nœuds, ça prendrait une heure, mais à un nœud, ça peut prendre 50 heures&h ellip; donc on ne sait pas trop.»

Bureau Vallée : « Grosse patate »

Nelson Burton :
« On a plutôt la grosse patate. L’option qu’on a choisie il y a quelques jours, fonctionne à fond ! On ressort fatigués des six jours de brise mais boostés, on a l’impression d’être dans la course encore, le but est de bien naviguer et d’aller vite. »
Louis Burton :
« On a dormi 3 heures par jour depuis l e départ, mais hier et cette nuit on s’est bien reposé. On n’avait jamais été dans du mauvais temps aussi violent que ça. Après les trois premiers fronts on était crevés, le bateau en vrac, on n’avait plus la force, on s’est motivés à deux, on a mis le bateau nickel. On a eu beaucoup de chance, un peu de réussite. Ça aide de naviguer avec son frère, on fait super attention l’un à l’autre. Quand un des deux n’a plus que 20% de batterie, il laisse celui qui en a 40% faire les choses. »

Damien Seguin (ERDF Des Pieds et des Mains) : « le moral va avec le soleil »

« On n’a pas encore de soleil mais déj&a grave; on ne se prend plus de seaux d’eau dans la figure !
On a encore du mal à dire quelque chose sur notre option, on s’est décalé très tôt dans la course pour éviter les gros coups de baston et ça a bien fonctionné. La route semble assez claire pour la descente sur les Caraïbes c’est une course de vitesse, on va se défendre aussi bien que possible. On regarde beaucoup la météo, on va pouvoir tenter des petites choses ! On fait beaucoup plus attention à l’alimentation et à l’organisation de nos quarts. Les conditions sont meilleures le jour comme la nuit, le bateau tape moins, on a moins mal pour lui, on fait réchauffer des petits plats, le quotidien s’améliore. Le moral revient avec le soleil.»

Les positions des bateaux ce mercredi 9 novembre à 17h00:

IMOCA

1 – Virbac Paprec 3 (Jean-Pierre Dick – Jérémie Beyou) : 2744 milles de l’arrivée
2 – Hugo Boss (Alex Thomson – Guillermo Altadill) : 18,8 milles du leader
3 – Banque Populaire (Armel Le CLéac’h – Christopher Pratt) : 177,4 milles du leader

Multi50

1 – Actual (Yves Le Blevec – Samuel Manuard) : 3230,8 milles de l’arrivée
2 – Maitre Jacques (Loïc Fequet – Loïc Escoffier) : 309,3 milles du leader

Class40

1 – Aquarelle.com (Yannick Bestaven – Eric Drouglazet) :3298,3 milles de l’arrivée
2 – ERDF Des Pieds et des Mains (Damien Seguin – Yoann Richomme) : 94,1 milles du leader
3 – Groupe Picoty (Jacques Fournier – Jean-Christophe Caso): 141,8 milles

Transat Jacques Vabre

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Mis à l'eau le: 9 novembre 2011

Matossé sous: 2011, Course au Large, Transat Jacques Vabre

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