Une édition record ?

© François van Malleghem

Le soleil est revenu à Madère, la brise s’est enfin calmée. A 24h du coup d’envoi de la 2e étape de la Transquadra – Martinique, l’heure est venue de se pencher sur les fameux fichiers météo… La tendance observée depuis plusieurs jours se confirme : l’alizé est là, pour l’instant installé de Madère au Marin, sur l’orthodromie. Un schéma idéal pour battre le record (vieux de 15 ans) de la course ? Ou pas…

Février 2003, Xavier Fraud et Jean-Baptiste Robert, sur leur Sprint 108, coupent la ligne d’arrivée de la Transquadra après 13 jours et 18 heures de course entre Porto Santo et la Martinique. La flotte des quadrasailors avait hissé les spis à Madère pour ne les ranger qu’à leur arrivée, aux Antilles. Ce schéma idéal semble se profiler devant les étraves des concurrents de cette édition 2017/2018.

« La météo s’annonce sympathique avec du spi et du spi au programme ! », confirme le très expérimenté François Gouin, quatre Transquadra à son actif dont une victoire en double en 1999 et une 2e place en solitaire en 2005.

 

« Les prévisions sont très proches de celles de 2003 », précise Frank Lang, président de la Transquadra solo, « mais il faut rester prudent, cela peut toujours évoluer d’ici l’arrivée. »

Au Marin dans 12 à 13 jours ?

20 à 25 nœuds établis de nord-est sont attendus demain après-midi au large de Madère pour le départ des 85 concurrents vers les Antilles. Ce régime d’alizé, un brin plus soutenu juste dans le sud de l’orthodromie, devrait se maintenir jusqu’en milieu de semaine prochaine.

A partir du milieu-fin de semaine prochaine, soit à un gros tiers du parcours, cette brise portante pourrait s’essouffler (à 10 – 15 nœuds), mais aucun phénomène perturbateur ne semble pour le moment vouloir réellement perturber l’alizé.

Les routages tablent donc, selon les polaires, sur 12 à 13 jours de course. Ainsi, aujourd’hui, sur le papier, le record de la Transquadra devrait être battu !

Il y a toujours des coups à jouer

Qui dit « autoroute » dit « tout droit ». Peu de grandes options tactiques sont envisagées. La flotte des quadrasailors devrait évoluer de façon plutôt groupée, mais un tel schéma météo ne sera cependant pas synonyme de platitude tactique : « Il y a toujours des coups à jouer, il faudra être attentif… », sourit François Gouin.

« J’ai ma stratégie en tête », confirme Patrick Paris, « pour moi, il faut aller chercher un peu sud, pas trop, mais suffisamment pour aller chercher un peu plus de pression et un meilleur angle. »

De fait, des options pourraient poindre dès les premières minutes de course. La volcanique Madère culmine à 4512 m : un très important dévent est généré par l’île. Logiquement, les routages proposent de plonger plein sud pour s’en dégager au plus vite : intéressant dans le cas d’une option sud, ce crochet d’environ 80 milles pourrait s’avérer peu rentable dans la perspective d’une trajectoire ouest, proche de l’orthodromie.

« La question se pose vraiment », souligne Vincent Zaleman, skipper d’AD Nantes, en double avec Yann Dube. « Je me souviens avoir suivi les conseils d’un routage sud au départ il y a trois ans, pour se dégager du dévent de Madère, ça n’avait pas payé… », confirme Alain Roland, skipper de MACSF.

C’est dans les trois premiers jours que ça va se passer !

Et puis, il y aura ceux qui vont attaquer dès 16h01 demain, et ceux qui vont choisir de s’octroyer quelques heures d’échauffement avant de prendre un rythme « course ».

Olivier Burgaud et Louis Lagadec sur LS Résa, 14e de la 1ère étape alors qu’ils visent un podium final voire mieux. Ils sont « énervés » : « Vu notre classement, on ne va pas partir doucement ! Nous serons raisonnables, mais le vent annoncé pour samedi est gérable, alors on va attaquer ! C’est dans les trois premiers jours que ça va se passer ! Il faudra être rapide : on sera dessus tout le temps. »

Eric Thomas (Big Z), vainqueur de l’étape Barcelone / Madère en solitaire : « ça reste une course, personne ne va y aller tranquille, donc je ne vais pas y aller tranquille ! Il ne faut pas casser, mais il faut envoyer tout en restant bien sûr raisonnable. Il ne faut pas rater le coche et choisir le bon spi… »

 

Patrick Baggio « Nous allons partir très tranquillement. On ne vise pas le top 10, on le sait, et puis… on n’a plus 40 ans ! »

 

Hervé Geraud et Frank Aubin (Pour Victoire) : « S’il y a beaucoup de vent samedi, on la jouera cool le temps de se mettre dans le bain. On accélèrera petit à petit : la route est longue ! »

Chacun sa course, donc… Au regard des options, des potentiels et objectifs de chaque concurrent, une hiérarchie pourrait s’établir dès les premiers jours.

Après, il y a l’Atlantique à traverser

Ensuite, il faudra anticiper le coup de mou possible de l’alizé, avant de se préparer au délicat atterrissage sur les Antilles. Entre grains et, surtout, les bancs de sargasses annoncés 600 à 800 milles avant la Martinique.

« Dans la zone de grains près de l’arrivée, il y aura des coups à jouer. On a une petite idée de ce que l’on veut faire, mais je pense qu’on a la même que tout le monde ! Et on regardera ce que font les autres, c’est de la régate ! Concernant les sargasses, nous avons des cannes à algues, une hélice protégée, nous n’irons pas perdre de temps à contourner une zone hypothétique … », lance Olivier Burgaud.

 

« Les sargasses, c’est un point important à prendre en compte, mais je verrai sur place. Les photos satellites dont on dispose ne donnent pas forcément les infos dont on a besoin », confirme François Gouin.

Une chose est sûre, record ou pas record, ces deux semaines de course s’annoncent intenses pour les 147 concurrents de la Transquadra – Martinique !

Départ demain, 10 février, à 16h (heure française) pour les 25 solitaires et quelques 20 minutes plus tard pour la flotte des doubles, au large de Quinta do Lorde, à Madère.

Des pros au chevet des amateurs

Plusieurs concurrents se sont appuyés dès le début de leur préparation sur l’expertise de coureurs professionnels. Alexis Loison et Maxime Sorel sont même venus sur place à Madère épauler leurs « poulains » respectifs. Corentin Douguet, Christopher Pratt également engagés auprès d’équipages, poursuivent leur accompagnement à distance. Tandis que le Team Transquadra La Rochelle, constitué de 18 bateaux engagés sur la course s’est cotisé pour faire venir à Quinta do Lorde leur entraineur Marc Reine.

Ces prestations sont un des révélateurs de la montée en puissance du niveau technique et tactique de cette transat amateur, mais la relation établie entre ces coachs et leurs « élèves » garde toute la saveur humaine de l’esprit Transquadra : « Ce sont tous des amis ! On se connaît depuis longtemps, cela fait partie du plaisir de ce travail. Humainement c’est très sympa et enrichissant, il y a de l’échange. Et puis, j’ai de la chance, j’ai de bons élèves ! » précise Alexis Loison, qui accompagne Louis-Marie Dussere (Raging Bee), Philippe Girardin et Gwenaël Thomas (Jataka) et Jean-Pierre Kelbert (Léon).

« C’est sympa ! La différence d’âge fait que ce n’est pas toujours évident, mais ils sont très à l’écoute et efficaces ! Humainement c’est riche, et j’ai découvert la Transquadra, une course géniale, ouverte, qui permet de réaliser une transat dans de bonnes conditions avec un niveau sportif élevé en plus !

C’est leur première traversée de l’Atlantique, ils ne s’arrêteront peut-être pas là… c’est enthousiasmant », commente Maxime Sorel, skipper du Class40 V&B, qui épaule le duo des Cyrile Bouvet et Chapuis (Naviguons contre le diabète).

Corentin Douguet a coaché depuis près de deux ans Patrick Baune et Jean-Eude Renier (JPK 10.80 Shaitan) basés à Lymington ; Jean-Yves Legall et Antoine Le Villain (Ofcet 32 On Line) et Pascal Chombart de Lauwe et Fabrice Sorin (JPK 10.10 Ogic).

Christopher Pratt avait entrainé les coureurs du CEM (Centre d’entrainement méditerranéen).

Source

Jacques Pallu

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Informations diverses

Mis à l'eau le: 9 février 2018

Matossé sous: Course au Large, TransQuadra

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