Route Nord d’abord !

  • © Yann Riou
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Après un départ spectaculaire porté par une rare ferveur populaire, la régate a pris tous ses droits pour les quatre trimarans Ultimes de la Transat du Centenaire. Le début de course ne fait pas mentir les prévisions. Le paquebot, calé sur la route directe, turbine à 24-25 nœuds de moyenne quand les maxi-multicoques, empêtrés dans les calmes d’une dorsale anticyclonique, dépassent difficilement la petite dizaine de nœuds. C’est dire si ça ne pas vite pour ces bolides des mers, en panne de vent et privés de leur si précieux carburant pour rivaliser avec ce géant d’acier qui avale les milles – à raison de 480 par jour – avec une régularité de métronome.

Une dorsale sur le dos

Comme prévu, les petits airs majoritaires dans les eaux de l’estuaire de la Loire ont continué de prendre du plomb dans l’aile au fil de cette première journée de course, obligeant les 22 marins sur les rangs à ne surtout rien céder pour tracer leur trajectoire sur une route Nord qui l’a pourtant emporté à l’unanimité. « Ce matin on voit que les quatre bateaux ont choisi l’option Nord. L’option Sud ne n’est pas révélée réaliste à long terme. Sur une trajectoire au Nord-Ouest, ils ont donc d’abord longé la côte, avant de se diriger vers l’Irlande. Mais ils doivent aussi traverser une immense zone de calmes qui s’étend de la pointe des Cornouailles Anglaises jusqu’au large de la Péninsule Ibérique », commente Dominic Vittet, le consultant météo de la course, embarqué à bord et aux premières loges pour apprécier in situ les conditions qui sévissent sur le plan d’eau.

Dépression au-dessus du jardin

Pour autant, dès demain, la course devrait radicalement changer de visage et prendre une toute autre tournure à l’approche d’un système dépressionnaire, qui doit permettre aux bolides à voiles de franchement accélérer la cadence. « La nuit prochaine et les journées de mardi et mercredi s’annoncent bien meilleures et surtout plus musclées : plus les voiliers vont se rapprocher de la dépression, plus le Sud-Ouest va fraîchir (jusqu’à une vingtaine de nœuds) et basculer au Nord-Ouest, » ajoute le météorologue. Dans un ciel chargé de grains, les funambules devront virer et attaquer un grand bord vers le centre de l’Atlantique, leur jardin à tous. À ce petit jeu, le plus prompt à attraper ces vents propices aux hautes vitesses dans ses voiles pourra creuser de premiers écarts à coups d’accélérations fulgurantes.

Duel de tête

Pour l’heure, dans le sillage du paquebot, qui affiche déjà 250 milles d’avance, la bataille fait rage entre les six hommes du bord de Macif (François Gabart) et le quintette d’IDEC SPORT (Francis Joyon), qui s’échangent leadership au gré des classements. Cet après-midi, ils se tiennent, en visu et au contact, en une poignée de milles sur les eaux paisibles de l’Atlantique. Derrière, l’équipage de Sodebo Ultim’ (Thomas Coville), qui a concédé du terrain dans la première bataille de bords à tirer au plus près des côtes bretonnes, affiche un débours de 15 milles. Actual (Yves Le Blévec), le moins performant des quatre ferme logiquement la marche à 20 milles du duo de tête. Mais dans les prochaines heures aussi, les prémisses des vents frais attendus devraient lui permettre d’accélérer la foulée. Et pourquoi pas renverser la vapeur face au Queen Mary 2 qui devrait, lui, ralentir le tempo, dans ces conditions plus musclées. Pour l’heure, le commandant Christopher Wells tire le meilleur de ses quatre moteurs de 21 000 chevaux. Et la croisière bat son plein à bord du paquebot lancé, pied au plancher, sur la route qui mène à New York…

Mots et messages du bords

Yves Le Blévec (Actual) :

« Actuellement, le vent mollit pas mal. On progresse dans une dorsale qui n’est pas très, très bien marquée, c’est assez instable. On avance à 8-10 nœuds dans une petite houle résiduelle. On vient de traverser le rail d’Ouessant. On espère retoucher du vent dans les heures qui viennent. On discute avec Sam (Davies) et Jean-Bat (Le Vaillant) de la stratégie à venir. Il va y avoir un virement à passer au niveau de l’Irlande. La question est de savoir quand dans une fenêtre de quatre heures à peu près. Il y a pas mal de paramètres qui entrent en jeu, notamment une petite dépression qui n’est pas facile à identifier. On connaît le schéma général, mais on ne connaît pas encore le timing exact. »

Jean-Luc Nélias (Sodebo Ultim’) :

« On traverse actuellement un système sans vent, une dorsale entre deux dépressions. On a la journée pour traverser ça. On voit Macif qui est 7-8 milles devant nous, et un peu par le travers à 4 milles, il y a IDEC SPORT. Sinon, on voyait encore Actual ce matin, mais il a disparu. Si tout va bien, on devrait toucher du vent frais ce soir, mais la zone de calmes est assez importante et cela reste assez aléatoire. On a réussi à se décaler un peu d’IDEC SPORT, de 3-4 milles. Ce n’est pas grand chose, mais cela peut permettre de toucher une risée avant lui… ou après ! On verra bien, mais il y a match, ça régate pas mal. »

Yann Riou (Macif) :

« Nous sommes en train de traverser notre première dorsale. Le vent, qui n’a jamais été très fort depuis le départ a faibli petit à petit jusqu’à maintenant, où nous déplaçons sur l’eau à la vitesse de 6 nœuds. Lorsque nous aurons passé l’axe de cette dorsale, le vent forcira progressivement. Évidemment, le premier bateau qui retouchera du vent pourra creuser un peu l’écart sur ses concurrents. D’où l’importance de ce qui se joue en ce moment. Bonne ambiance à bord. Hier, la journée a été sportive, avec plusieurs virements, dont certains sous J1, notre plus grand génois, et donc le plus long à reborder. Aujourd’hui c’est un peu moins physique, mais on reste très concentré pour sortir des calmes. On surveille IDEC SPORT qui est à vue, et SODEBO Ultim’ sur l’AIS (système de reconnaissance et de positionnement). Le tout sous un léger fond musical – la « playlist » de François – qui sort d’une petite enceinte dans le cockpit. »

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