Noir, c’est noir

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© Conrad Colman

L’espoir de retrouver de la brise se concrétise enfin car si les premiers ont parfois dû composer avec des zones de transition, le plan d’eau des Kerguelen à Martim Vaz est désormais bien balayé par un souffle de plus en plus puissant. Et le peloton est sorti du tunnel de l’anticyclone de Sainte-Hélène : les vitesses croissent alors que deux nouveaux solitaires sont passés cette nuit en mode Indien…

Noir comme cette nuit sans lune, car même si les jours rallongent de plus en plus au fur et à mesure que l’été austral pointe son nez et que les solitaires gagnent dans le Sud, les quelques heures de ciel étoilé sont plutôt lugubres avec ces fronts successifs qui couvrent l’horizon. Noir comme ce tunnel dont le point de sortie est encore à quelques dizaines de milles pour le groupe des quatorze qui rentre dans des Trentièmes encore maniables et encore tempérés. Noir comme ce bateau britannique qui ne lâche pas d’une semelle le leader : les deux skippers sont à portée de lance-pierres de l’archipel des Kerguelen, toujours au contact…

Du vent pour tous

Bref toute la flotte étalée sur 4 500 milles, navigue à plus de douze nœuds de moyenne, voire vingt pour les premiers. Des leaders qui ont préféré glisser dans un flux de Nord-Nord Ouest de 20-25 nœuds au-dessus des îles australes mais qui ont tout de même survolé le plateau continental, heureusement peu mouvementé. Dans les heures qui viennent, Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII) et Alex Thomson (Hugo Boss) à seulement une quinzaine de milles, vont longer le « mur des glaces » pour rester le plus longtemps possible devant un front en cours de dégénérescence. Il leur faudra ensuite composer la nuit prochaine avec une brise d’Ouest mollissante avant de bénéficier de la dépression suivante qui propulse la troïka au large de l’Afrique du Sud.

D’ailleurs, deux nouveaux « Indiens » ont franchi la ligne virtuelle de la longitude du cap de Bonne-Espérance cette nuit : Thomas Ruyant (Le Souffle du Nord pour le projet Imagine) est passé après 23j 06h 25′ de mer, soit avec 5j 7h 27′ de débours sur le leader, suivi à peine quatre heures plus tard par Jean Le Cam (Finistère Mer Vent) après 23j 10h 21′ de course, soit 5j 11h 23′ de retard sur le leader. Le prochain solitaire attendu est Kito de Pavant (Bastide Otio) demain, jeudi dans l’après-midi.

Enfin, tout à l’arrière de la flotte des vingt-cinq skippers encore en course, l’espagnol Didac Costa (One Planet-One Ocean) n’est plus qu’à une soixantaine de milles de Sébastien Destremau (TechnoFirst-faceOcéan) et qu’à 500 milles de la queue du peloton, alors qu’il était reparti des Sables d’Olonne avec quatre jours d’écart… Mais il va maintenant falloir gérer des mers du Sud plus conformes à leur réputation de violence et de persévérance : il ne va pas y avoir beaucoup de pauses ces prochains jours de l’Atlantique Sud à l’océan Indien !

Passage à la longitude du cap de Bonne-Espérance

  1. Alex Thomson : 17j 22h 58′
  2. Armel Le Cléac’h : 18j 03h 30′ à 4h 32′ du premier
  3. Sébastien Josse : 18j 12h 42′ à 13h 44′
  4. Paul Meilhat : 20j 11h 54′ à 2j 12h56′
  5. Jérémie Beyou : 20j 12h 41′ à 2j 13h 43′
  6. Yann Éliès : 21j 03h 18′ à 3j 04h 20′
  7. Jean Pierre Dick : 22j 21h 13′ à 4j 22h 15′
  8. Thomas Ruyant : 23j 06h 25′ à 5j 07h 27′
  9. Jean Le Cam : 23j 10h 21′ à 5j 11h 23′

Éric Bellion (Commeunseulhomme) :

« C’est une nuit sans lune : je plonge enfin plein Sud avec du portant avec des vitesses sympas. Ça change la vie et c’est plutôt agréable ! On a pas mal galéré dans cet anticyclone : on a fait du près, avec une mer assez chaotique et ce n’était pas facile de trouver la sortie vers les mers du Sud. J’ai préparé le bateau, j’ai mis les poids à l’arrière, j’ai mis de côté les voiles du Sud… On est parti sur le grand toboggan pour un bout de temps ! C’est une marche importante sur ce tour du monde : j’y pense depuis pas mal de jours avec plaisir et un peu d’appréhension. C’est pour maintenant : après l’entrée, voici le plat principal… Qui va durer des jours. Mais on va voir les longitudes défiler : dans quatre jours, on sera à Bonne-Espérance, dans dix jours à mi-chemin entre l’Afrique et l’Australie. Ce sont de grands traits sur la carte qui s’annoncent. Je viens de rentrer dans les Trentièmes et il ne fait pas encore très froid : j’ai tout de même sorti une polaire et je vais commencer à m’habiller plus chaudement. On passe des tropiques à l’été austral ! On est toujours groupé et c’est sympa pour faire cette grande traversée des mers du Sud : c’est plus rassurant et cela donne de l’émulation. C’est une nouvelle étape qui s’annonce surtout qu’il y a un cap très important pour moi : le cap Leeuwin que je n’ai jamais passé à la voile. Le bateau va bien même si j’ai eu pas mal de bricoles à faire : il est à 100%. Quant à moi, je me suis refait une santé ces derniers jours parce que j’étais fatigué… On a tous les deux très envie d’y aller ! »

Romain Attanasio (Famille Mary-Étamine du Lys) :

« On avance enfin après une journée assez pénible hier ! Quelle galère : j’avais Cali (Arnaud Boissières) à mon vent qui progressait et moi, j’étais collé… Une misère, dans une zone pourrie de convergence des vents. À un moment, j’avais trois nœuds de vent de Nord, plein vent arrière et je voyais les autres partir. Ça s’est levé en fin de journée et j’ai même pris un ris dans la grand-voile parce que ça penchait trop. J’ai 18-20 nœuds de vent de Nord maintenant : c’est la sortie du tunnel ! Avant il faisait chaud et maintenant, il faut commencer à se couvrir : j’ai mis des chaussettes cette nuit et j’ai sorti la couverture. Je ne vais pas aller trop au Sud : je n’ai pas envie d’aller en plein cœur du coup de vent et il va falloir trouver une trajectoire pour longer l’anticyclone de Sainte-Hélène afin de rester dans du vent maniable. J’ai eu des contacts avec quelques autres concurrents, en particulier avec Cali et Éric Bellion. Et j’ai encore vu deux cargos il y a une heure : on doit être sur une route maritime… Maintenant, il n’y aura plus personne jusqu’au cap Horn ! J’avais mal au ventre hier à cause d’un morceau de fromage pas frais, mais ça va très bien maintenant. »

Source

Agence Mer & Media.

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