Du TAAF à la Crozet des chemins !

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© Sébastien Josse

A 400 milles des îles Crozet (archipel des Terres Australes et Antarctiques Françaises), Armel Le Cléac’h vient de reprendre les commandes de la flotte du 8e Vendée Globe. Banque Populaire VIII surfe bâbord amures à 20 nœuds dans un vent de nord-ouest forcissant, tandis que son rival Hugo Boss, distant de 3 milles, affiche 18 nœuds au compteur. Le long de la zone des glaces interdite à la navigation, les deux leaders se livrent à un duel sans merci. Qui doublera les Kerguelen en premier ? Le suspense reste entier…

Et c’est reparti pour un tour de manège ! Après 24 heures de navigation dans des vents erratiques, les deux leaders ont remis du charbon. Au fil des heures, le vent de nord se renforce pour atteindre les 20-25 nœuds, des conditions idéales pour avaler les milles sans trop forcer sur les bolides. Le vent venant de la gauche, les foils tribord devraient être largement sollicités. Alex Thomson sera t’il alors pénalisé suite à la casse de son appendice le 19 novembre ? Ce sera en tout cas à surveiller, car a priori, les conditions seront propices à voler sur l’océan Indien une bonne partie de la semaine…

Enorme scission sur la flotte du Vendée Globe !

Pour les dix premiers, d’Armel Le Cléac’h à Kito de Pavant (Bastide Otio), l’affaire ne se déroule pas trop mal. La preuve : Yann Eliès (Queguiner-Leucémie Espoir) est en passe de doubler la longitude du cap de Bonne Espérance ce soir vers 22h, et devrait lui-aussi battre le record d’Armel établit en 2012, soit 22 jours 23 heures et 46 minutes… Le Vendée Globe express est toujours d’actualité, et même si Kito navigue à 2 400 milles des premiers, il glisse dans un bon flux de sud-ouest qui jamais ne s’arrêtera jusqu’à son entrée dans l’océan Indien.

Les 15 autres concurrents morflent. Au près, dans une mer chaotique, ils enchaînent des virements de bord, se crèvent à la tâche après avoir déjà bien dégusté six jours durant dans les tentacules de l’anticyclone de Sainte-Hélène. « Je suis fatigué. J’ai pas mal puisé dans mes ressources. Sur ces bateaux, on n’a pas le droit de rentrer dans la zone rouge, et j’y suis rentré un peu avec les conditions difficiles qu’on rencontre. Ca tape dans tous les sens, c’est un truc de fou ce métier de marin ! » confiait Eric Bellion (CommeUnSeulHomme) cet après-midi à la vacation. Comme si cela ne suffisait pas, les marins vont encore en baver. Une zone sans vent se déplace diaboliquement pile-poil en travers de leur chemin. Deux Vendée Globe pour le prix d’un, voilà clairement aujourd’hui l’état de la flotte des 25 bateaux en course !

Shota Kanda, responsable communication Spirit of Yukoh :

« Kojiro va super bien. Il m’a appelé hier. Ça va de mieux en mieux. Il va de plus en plus vite. Il est content de naviguer près des autres. C’est plus sécurisant et il voit s’il navigue bien ou pas. A la moindre erreur il peut perdre une place. Il a déjà été dans le grand Sud. Les premiers jours sont les plus durs là-bas, pour s’habituer à la force du vent. Il ne faut pas aller trop vite. Il a mis 17 jours à manger un sac qui lui était destiné pour une semaine. Là il mange mieux, il fait quatre repas par jour, à base de riz. Hier il avait bien dormi dans la journée. Il fait des quarts de 40 minutes. Il a bien récupéré. Il nous a envoyé une photo de la croix du Sud. Ça lui fait plaisir d’être dans le Sud. On fait un live avec le Japon tous les vendredis, à 22h, quand beaucoup de gens regardent la télévision. Il est content que de plus en plus de japonais le suivent. Après le Vendée Globe, la chaine nationale NHK va faire plusieurs reportages sur lui. Il est très content que ça arrive là et qu’il puisse faire parler de la voile au Japon. »

Pieter Heerema, No Way Back :

« Je me dirige vers le sud – je devrais être plus ou moins dans l’anticyclone, mais le vent est étrangement fort avec environ 18 nœuds jusqu’ici et du coup 20 nœuds. Les vagues sont énormes et ça tape fort depuis plus de 24 heures. C’est surprenant car normalement les conditions dans une anticyclone sont calmes avec des vents légers et pas de vagues. Mais tout va bien. Il fait plus froid et on peut vraiment constater que la température baisse d’un cran toutes les cinq ou six heures. J’avais prévu d’aller vers le sud jusqu’à ce que je touche ce front. Mais quand j’ai regardé plus loin, il y avait trop de risque de me retrouver dans une grande zone anticyclonique alors j’ai quitté le front et décidé d’aller vers le sud à nouveau. Ce n’est pas top. Le bateau fait des mouvements désagréables et je tape lourdement dans les vagues, mais je pense qu’à long terme, il vaudra mieux aller le long de l’anticyclone au lieu d’être plein dedans. On verra… »

Eric Bellion, COMMEUNSEULHOMME :

« Je suis encore dans une phase de repos. Je m’épargne un peu car je veux être en forme pour le Sud. J’ai puisé dans mes ressources donc je ne suis pas au maximum. Je n’ai pas toute la toile. J’essaye de faire des longues siestes. C’est très nouveau pour moi. Je n’ai pas les automatismes des solitaires. Chaque moment de repos est un peu pris de haute lutte. J’essaye de freiner un peu le bateau. J’arrive à dormir une demi-heure, quarante minutes, voire une heure en fin de nuit. Avec du recul, c’est assez dingue. Etre en train de dormir dans un bateau de 18 mètres, penché à 30°, qui tape dans tous les sens. C’est un truc de fou ce métier de marin sur IMOCA. J’essaye de prendre tout ce que je peux prendre comme repos. C’est mon p’tit nid. C’est ma cahute. Je fais tout là à part manœuvrer et matosser. J’ai 16 nœuds dans la gueule actuellement. Je fais vraiment du près. Je fais cap plein Sud. Le vent est pile dans la direction où on veut aller, donc on tire des bords. Un virement de bord, ça ne se fait pas comme ça. Je suis dans une optique où chaque jour de navigué est un bonus. Je ne sais vraiment pas jusqu’où je vais aller. Je vais aller voir le Sud, voir ce que ça donne, voir si je suis capable de le faire. Depuis 3 semaines, je découvre un nouveau truc tous les jours. C’est une aventure sans concession. »

Jérémie Beyou, Maître CoQ :

« Je ne vois pas trop ce qui se passe devant. Je suis toujours en pénurie de météo. Je fonctionne avec les bulletins fournis par la Direction de Course. J’arrive à capter les bulletins de sécurité par le satellite. De temps en temps j’arrive à me connecter et à avoir un fichier grib. J’ai du mal à me projeter plus loin que 24h ou 36h. C’est vraiment de la navigation à l’observation. Je n’ai pas encore vu Paul. Je ne peux même pas l’appeler. J’ai essayé de l’avoir à la VHF. Comme j’ai un problème de connexion satellite, je fais toute la course avec un petit Iridium. C’est comme sur les petits bateaux de plaisance. Quand je dois télécharger quelque chose, je suis obligé de tenir une petite antenne et de la mettre dehors. C’est quasiment comme sur la solitaire du Figaro où tu n’as pas le droit de te connecter et d’aller chercher des fichiers. Tu dois faire deux ou trois jours avec le même fichier. J’essaye de regarder les alertes météo pour voir s’il n’y a pas de mauvais coup à venir dans les 36h. Je regarde la trajectoire des autres. Je passe beaucoup de temps à la table à carte à faire des suppositions, des schémas, alors qu’en un clic ça devrait être fait. Je perds énormément de temps. Par exemple, je pensais qu’il y aurait 20, 25 nœuds, en fait il y a une rafale à 30. »

Tanguy de Lamotte, Initiatives-Cœur :

« Là je suis en train de faire du saute-mouton dans le golfe de Gascogne donc je serai quand même content de descendre. Je serai content d’en finir malgré le fait de déclarer mon abandon cet après-midi. J’aurai abandonné avant de passer la bouée Nouch Sud. Je reviens aux Sables, mais sans avoir fait le tour du monde. Dans mon malheur, il y a du positif. C’est extra dans ce projet d’avoir deux objectifs. C’est quelque chose d’assez fou de voir qu’on a pu réunir autant de personnes. Autant de personnes généreuses qui nous ont aidés à sauver 34 enfants. C’est aussi pour ça que j’ai voulu donner un maximum de temps à tout le monde. Sur le retour, j’ai fait des p’tites listes de prénoms, puisque ma femme est enceinte. On va avoir un deuxième enfant en mai. J’ai pensé à des plans de bateau. J’ai pensé à pas mal de choses. J’ai pensé à ce Vendée. C’est vrai que je suis assez fier de la manière dont on était préparés au départ. On a super bien bossé. On ne méritait pas ça. Je vais prendre quelques jours à terre. Mais il faudra tourner la page. La digestion se fera dans quelques semaines. « 

Morgan Lagravière, Safran :

« Ça va plutôt bien. Au final on a eu la chance d’arriver dans un endroit assez exceptionnel. Cape Town est une ville magique. J’ai eu la chance d’être accueilli par un ballet d’une centaine de baleines autour du bateau, dans des couleurs exceptionnelles, avec le relief et le lever du soleil en arrière-plan. Il y a eu une espèce de phase de transition entre le milieu maritime et le milieu terrestre. En arrivant à terre, il y a avait toute l’équipe PRB pour m’accueillir, sachant que l’équipe technique Safran n’était pas encore sur place. On a pris le temps de débriefer et d’aller se faire un bon restau. C’était très sympa. On a fait l’accueil de Vincent hier à 2h du mat’. Ça permet de rentrer dans une dimension qu’on avait perdue en partant seul en mer. On se soutient les uns les autres. Vincent est dans le même état d’esprit que moi. On est déçus, touchés, mais l’important, c’est de positiver sur ce qu’on a vécu, sur l’expérience qu’on a vécue sur le Vendée Globe et sur ce qu’il nous reste à faire derrière. Il y a des choses qu’on ne maîtrise pas dans la vie. Ce sont des coups du sort. Il faut trouver des solutions pour réparer et ramener le bateau à la maison. Que ce soit lui ou nous, on est plus dans le concret, dans l’action, pour sortir la tête de l’eau. On essaye de faire en sorte que ça se passe dans la joie et la bonne humeur. C’est très agréable de pouvoir partager cette phase à deux équipes, avec de belles interactions et une belle dimension humaine. »

Source

Agence Mer & Media.

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