La grande première de Beyou !

 

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    © Olivier Blanchet / DPPI
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u (Maître CoQ) a remporté, mercredi, la première édition de la New York – Vendée (Les Sables d’Olonne). Cette victoire transatlantique est sa première en IMOCA60 en solitaire. Le Finistérien, qui s’impose devant Sébastien Josse (Edmond de Rothschild) et Alex Thomson (Hugo Boss), s’affirme comme un très sérieux prétendant à la victoire dans le Vendée Globe, qui s’élancera des Sables d’Olonne le 6 novembre prochain.

Avant même sa victoire sur cette première New York – Vendée (Les Sables d’Olonne), il ne faisait guère de doute que Jérémie Beyou fait déjà partie des grands skippers solitaires français. Ses trois victoires sur la Solitaire du Figaro en 2005, 2011 et 2014, sur des Figaro Bénéteau monotypes, comme ses deux titres de champion de France de course au large, étaient déjà des gages évidents de son potentiel de régatier. S’il a tardé à s’imposer en IMOCA, c’est que la concurrence est rude dans la classe reine de la course au large en monocoque, mais aussi parce que la poisse qui l’a poursuivi a parfois été plus persistante que le brouillard au-dessus de New York.

Jérémie Beyou a porté comme un poids ses deux abandons dans les Vendée Globe sur lesquels il s’est aligné. En 2008-2009, il est victime d’un démâtage au large du Brésil et, en 2012-2013, c’est le vérin de quille de l’ancien Foncia – sur lequel Michel Desjoyeaux avait gagné la précédente édition – qui rend l’âme au large du Cap-Vert.
Il y avait eu, auparavant, un abandon pour raisons personnelles sur la Route du Rhum 2006 (sous les couleurs de Delta Dore), mais aussi une deuxième place sur la Route du Rhum 2014 où il avait pris la deuxième place de la catégorie IMOCA, derrière un certain François Gabart… En double, Jérémie Beyou connaît autant d’heures de gloire que de moments de frustration : une victoire, en 2011, sur le Virbac-Paprec 3 de Jean-Pierre Dick et une troisième place avec Christopher Pratt en 2013 sous les couleurs de Maître CoQ ; un abandon, en 2015, sur casse matérielle avec Philippe Legros.

Sa victoire, ce mercredi 8 juin sur la New York – Vendée, ne doit pas tout, loin de là, à la vague d’avaries qu’a connue la flotte le lendemain du départ. Certes, le demi-tour à Newport des IMOCA60 à foils endommagés (StMichel-Virbac, Banque-Populaire VIII – tout frais vainqueur de The Transat Bakerly – et Safran), mais aussi le demi-tour pour les mêmes raisons de Quéguiner – Leucémie Espoir, et l’arrêt aux Açores de PRB, ont éclairci le champ de jeu. Mais Jérémie Beyou aura maîtrisé les « foilers » de Sébastien Josse (Edmond de Rothschild) et d’Alex Thomson (Hugo Boss), réputés pour être deux des bateaux au plus fort potentiel de vitesse de la flotte IMOCA60.

Maître CoQ est un bateau de la précédente génération. Mis à l’eau en 2010, sous les couleurs de Foncia 2 avant de passer rapidement sous la bannière Banque Populaire, il est le fruit de la collaboration du cabinet d’architectes VPLP, d’un autre architecte, Guillaume Verdier, et du savoir-faire de Michel Desjoyeaux. C’est avec ce bateau qu’Armel Le Cléac’h a terminé 2e du Vendée Globe 2012-2013, à un tout petit peu plus de trois heures de François Gabart (Macif). En janvier 2016, Jérémie Beyou faisait équiper son plan VPLP-Verdier de foils (ces dérives courbes qui permettent de sustenter le bateau) de deuxième génération. Et, pour sa première sortie au large en course, Jérémie Beyou vient sans doute de prouver qu’il a fait le bon choix.

ILS ONT DIT

Jérémie Beyou (Maître CoQ)

Bonheur – « Cette victoire est un grand bonheur parce que c’est une transat en solitaire, en IMOCA60. J’avais déjà gagné en double sur une Transat Jacques Vabre, mais là, j’étais tout seul. En plus, j’arrive en France, ici aux Sables d’Olonne. C’était aussi l’objectif de toute la flotte que de se jauger sur cette Transat : il fallait performer pour se rassurer avant le départ du Vendée Globe. Et c’est juste génial. »

 

Passages importants – « J’ai senti que ça pouvait me sourire quand j’ai réalisé que je parvenais à tenir Seb (Josse).J’étais dans la cadence des meilleurs, c’était bon signe. J’ai bien senti le bateau, je me sentais bien, je faisais de bonnes trajectoires. J’ai vraiment senti que c’était possible quand on s’est retrouvé à trois, puis j’ai compris que c’était quasiment fait après l’empannage, hier matin, au nord de l’Espagne. Ça a refusé et je suis parti devant. Je savais qu’il y aurait encore des molles, mais tout le monde allait en souffrir. »

 

Validation des choix technologiques – « Cette victoire valide plein de choses. La grosse partie visible du travail qu’on a fait en chantier est les foils, mais on a aussi fait beaucoup d’optimisations pour que tout fonctionne et que je me sente à peu près à l’aise. Cette victoire est hyper importante en elle-même, parce que cette New York – Vendée (Les Sables d’Olonne) est une grande course océanique, mais c’est aussi important pour le Vendée Globe : ça va être difficile pour moi de me cacher, maintenant ».

 

Concurrence – « Je suis conscient qu’il y a eu des abandons, des avaries, mais j’ai tenu la dragée haute à des skippers qui sont de vrais champions. Alex Thomson est une référence de l’IMOCA, et il n’est même pas utile de présenter Sébastien Josse, qui a d’énormes qualités. Et puis Maître CoQ a aussi résisté à ces deux grosses écuries que sont Gitana Team et Hugo Boss ».

 

La remontée du chenal – « Le Vendée Globe, c’est le Vendée Globe… J’ai souvent remonté le chenal, notamment en Figaro Bénéteau 2, pour la Solo Maître CoQ. Mais je suis content d’aller occuper cette place au ponton. C’est la n°1. Je l’aime bien. Je suis content pour moi, pour toute mon équipe, pour mes partenaires, mes copains éleveurs vendéens. »

 

A propos d’Alex Thomson – « Alex a super bien navigué. C’est lui qui sait aller le plus vite, qui sait imprimer les cadences les plus infernales. C’est pour cela qu’il est une référence de l’IMOCA. Il est radical dans ses choix, parfois un tout petit peu trop, mais il ose prendre des risques dans ses trajectoires. Là, il est allé un tout petit peu trop au nord, ce qui l’a privé de la possibilité de redescendre, mais son choix aurait tout aussi bien pu payer. Et, à chaque course, tu te rends compte qu’il a encore progressé. J’en discutais un peu avec mon équipe : Alex est en train de réinventer la navigation en IMOCA. Il faudra peut-être, pour gagner le Vendée Globe, naviguer à sa façon il faudra être dans les clous et tenir la cadence façon Alex Thomson ».

ILS SALUENT SA VICTOIRE

Jean-Pierre Dick (StMichel-Virbac) :

« Ça fait plaisir pour Jérémie ! Il a eu ses moments de galère, lui aussi, notamment pendant le Vendée Globe où il a dû abandonner. Ce sont ces moments de bonheur-là que l’on va chercher. On a nos petits instants de bonheur en mer mais, globalement, ce que nous vivons est vraiment dur. Ces victoires, c’est ce qui drive nos journées. Vu le plateau sportif, c’est une très belle victoire. Jérémie peut être fier, il a fait une très, très, très belle course ! »

Vincent Riou (PRB) :

« La victoire de Jérémie est une très bonne nouvelle : c’est sa première victoire en solitaire en IMOCA60. Comme Armel a gagné sa première transat en solitaire du circuit sur The Transat Bakerly. Ce sont deux très bons et grands marins qui font de l’IMOCA60 depuis longtemps, et c’est normal qu’ils transforment l’essai. Ils ont très bien régaté. Et c’est une magnifique fin de course pour Jérémie, gérée avec beaucoup de lucidité. »

Yann Eliès (Quéguiner – Leucémie Espoir) :

« Je suis content pour Jérémie ! Cela fait tant d’années que l’on se croise, en Optimist, Class 8, Figaro 1, Figaro 2, et IMOCA maintenant. Souvent, quand l’un brille, l’autre est à la peine. Je suis content pour lui et son équipe, car il a fait un choix architectural et technique osé qui est vraiment payant aujourd’hui. Je suis aussi content pour son sponsor, vendéen de surcroît. Faites-lui bien la fête ! D’autant que Jérémie est vraiment marrant quand il a un petit coup dans le nez. »

LE FILM DE LA COURSE

Départ – Dimanche 29 mai à 21H40 (HF), depuis le phare d’Ambrose Light, à New York – Quéguiner – Leucémie Espoir, Safran, No Way Back et Banque Populaire ont touché des OFNIS et rejoignent Newport pour réparer, comme StMichel-Virbac (foil bâbord cassé).
Pour éviter le trafic maritime très dense, Jérémie Beyou passe par le sud, avec Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII), Paul Meilhat (SMA) et Fabrice Amedeo (Newrest Matmut)

  • J+1 – Lundi 30 mai – A 18 heures (HF), Vincent Riou (PRB) mène la flotte avec 1,6 mille sur Sébastien Josse (Edmond de Rothschild) et 9,4 sur Jérémie Beyou.
  • J+2 – Mardi 31 mai – Abandon d’Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII). StMichel-Virbac et Quéguiner Leucémie Espoir reprennent la mer après réparations. Une voie d’eau, suite à un choc avec un OFNI, contraint Vincent Riou (PRB) à réduire l’allure, à réparer et à envisager un arrêt aux Açores. Porté par un flux de sud-ouest de 17 à 21 nœuds, Alex Thomson (Hugo Boss) mène la danse avec une trentaine de milles d’avance sur Jérémie Beyou et Sébastien Josse.
  • J+3 – Mercredi 1er juin – Bataille d’empannage vers 10h30 du matin dans un vent d’ouest à 17 noeuds, pour aller chercher le cœur d’une dépression plus au nord. Jérémie Beyou empanne le premier, suivi un quart d’heure plus tard par Alex Thomson, toujours leader (21 milles), puis Sébastien Josse (à 30 milles de la tête). A 17 heures, tandis que les deux Français butent sur une zone de vents mous, Thomson s’échappe. A 22 heures, son avance est de 47 milles.
  • J+4 – Jeudi 2 juin – Tandis que Jérémie Beyou et Sébastien Josse se suivent sur un cap à l’est, Thomson insiste vers le nord. A la limite de la zone des glaces, interdite à la navigation, le Britannique creuse l’écart dans un flux d’ouest à 25-30 nœuds. A 18 heures, il a 85 milles d’avance sur Beyou et 88 sur Josse. Le trio de tête est parti chercher la bascule du vent au nord ouest, au nord du front froid, en se rapprochant du centre de la dépression. Ils encaissent des rafales à 45 nœuds. Morgan Lagravière (Safran) a repris la course.
  • J+5 – Vendredi 3 juin – 30-38 nœuds de nord-ouest, c’est encore le souffle qui opprime le trio de tête, vendredi matin. Les trois leaders s’échinent depuis une journée et demie dans le cœur de la dépression. A 15h30, Alex Thomson, qui a compté jusqu’à 101 milles d’avance, en a perdu la moitié. Toujours très nord, il plonge vers le sud-est en fin de matinée, tandis que Beyou et Josse font route vers l’est, puis empannent à 17 heures pour reprendre du sud et passer tribord amure. A bord, la tension est forte. Stressé, Jérémie Beyou retrouve un peu de stabilité sur son bateau en descendant son foil, ce qui lui confère plus d’équilibre. Il leur reste encore une petite journée de baston à assumer.
  • J+6 – Samedi 4 juin – Si Alex Thomson a perdu son avance, la veille, c’est parce qu’une panne de pilote automatique a provoqué un départ au vrac très brutal dans 28 nœuds de vent. Hugo s’est couché. Le skipper estime que c’est un dysfonctionnement de GPS qui en est à l’origine. A 8 heures, Jérémie Beyou prend la tête, collé par Sébastien Josse, à moins de dix milles sur la même trajectoire, et par Thomson, plus au nord.
  • J+7 – Dimanche 5 juin – Les trois hommes de tête profitent des dernières bonnes conditions de vent (on parle de vitesse…) pour avancer droit vers les Sables. Portés par du vent du sud, vers 17 heures, ils croiseront leur première molle. Beyou mène de 13,3 milles devant Josse et 55,6 sur Thomson.
  • J+8 – Lundi 6 juin – C’est mou sur le golfe de Gascogne. La nuit, à l’entrée de la bulle anticyclonique, s’annonce assoupie. Mais, forcément, les fichiers météo ne collent plus toujours à la réalité du terrain.
  • J+9 – Mardi 7 juin – La bataille au près, dans un vent d’est, puis de nord-est, est lancée. Dans le tout petit temps du matin, Jérémie Beyou vire pour quitter le sud du golfe de Gascogne pour remonter vers le nord. Son empannage, un peu anticipé, lui permet d’échapper à une bulle sans vent dans laquelle s’enferre Sébastien Josse. Alex Thomson annonce qu’il a adoré la bataille, mais qu’il l’a perdue. Vers 19h30, le skipper de Maître CoQ vire à l’est avec 12,5 milles d’avance sur Edmond de Rothschild et 43 sur Hugo Boss.
  • J+10 – Mercredi 8 juin – A 6 heures du matin, la messe est dire : Jérémie Beyou compte 29,8 milles d’avance sur Sébastien Josse et 44 sur Alex Thomson. A 14h37, il franchit la ligne d’arrivée en vainqueur après 9 jours 16 heure 57 minutes et 52 secondes de course.

Données de course :

  • Temps de cours : 9 j 16h 57min 52 s
  • Distance théorique entre Ambrose Light (New York) et Nouch Sud (Les Sables d’Olonne) : 3100 milles
  • Distance effectuée : 3 460 milles
  • Vitesse moyenne : 14,85 nœuds

Source

Isabelle DELAUNE

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