Vagues à larmes

© Jacques Vapillon

C’est aussi ce qui, paradoxalement, fait le sel de la Mini Transat îles de Guadeloupe. Pour qu’elle soit belle, pour que l’on s’y attache autant, elle a besoin de se nourrir non seulement de grands bonheurs, mais aussi de déceptions sévères, d’échecs cinglants. Après l’abandon de Davy Beaudart, c’est Radek Kowalczyk qui doit jeter l’éponge après avoir dû abandonner son Calbud tout neuf.

Pour le navigateur polonais, le coup est rude. En portant sur les fonds baptismaux ce nouveau concept de prototype destiné à être construit en série, Radek ouvrait une voie originale. Il espérait ainsi susciter de nouvelles vocations, inciter des navigateurs pas forcément très fortunés à se lancer dans le grand bain des prototypes, permettre à tout un chacun de bidouiller son propre bateau à partir d’une base commune. En 2011, pour sa première participation à la Mini Transat, le navigateur polonais avait mené jusqu’au bout un proto rafistolé de tous les bouts, car il y avait derrière la promesse de pouvoir revenir sur un bateau autrement plus performant. Il lui avait fallu attendre 2015 pour exaucer ses rêves, mais l’aventure n’ira pas jusqu’à son terme. La Mini Transat îles de Guadeloupe perd ici un marin particulièrement attachant qui conduisait son bonhomme de chemin sans forfanterie.

Revenir dans le match

Pour Sébastien Pébelier (Mademoiselle Iodée), il va maintenant falloir se remettre dans la course. Venu porter assistance à Radek, il a dû mettre entre parenthèses le costume du parfait compétiteur pour se transformer en amical chien de garde, assister à l’arrivée du cargo sur zone, puis du Class 40 Tauranga, et comble de frustration, devoir reprendre la course avant d’être certain que son collègue avait pu être sauvé. Difficile dans ces conditions de switcher ces heures porteuses d’une grande force émotionnelle, de retrouver immédiatement l’énergie nécessaire pour tirer le meilleur parti de son bateau. Quoi qu’il en soit, Sébastien Pébelier, devrait faire l’objet d’une décision du jury, qui devrait lui accorder un temps de bonification. Dans ce cas, le livre de bord devrait faire foi de ce que l’arrêt a coûté réellement au skipper de Mademoiselle Iodée.
Le reste de la flotte, même s’il n’est jamais agréable de perdre un copain en route, ne sentira évidemment pas les mêmes effets de contrecoup que Sébastien. Pour la plupart, la vie est maintenant focalisée sur la plus belle trajectoire pour rejoindre la Guadeloupe, sur la toile du temps, les vérifications quotidiennes qu’il faut effectuer autour des points sensibles : gréement, axes de safrans, barres de liaisons, voiles, etc. Quoique certaines préoccupations terriennes ne disparaissent pas forcément. Ainsi Katerina Ham (katerinahamracing.com) s’inquiétait avant tout de savoir le verdict de la finale de la coupe du monde de rugby. Avertie de la défaite de son équipe, la navigatrice australienne, belle joueuse, s’est contenté d’un bref « cool », en guise de commentaire.

A droite, mais pas trop

Comme on pouvait s’y attendre, la flotte a commencé à mettre de l’ouest dans sa route avant d’arriver sur l’archipel du Cap-Vert. Néanmoins, c’est un véritable dilemme qui se dresse devant les coureurs. Le vent reste toujours plus soutenu dans le sud de la zone de course et chacun est confronté au même problème : jusqu’où faut-il accepter de rallonger sa route ?
En série, ils sont trois à naviguer bord à bord. Ian Lipinski (Entreprises Innovantes) contrôle parfaitement les attaques de Benoît Hantzperg (YCA Dhumeaux Secours Populaire) et Julien Pulvé (Novintiss). Quatrième, Tanguy Le Turquais (Terréal) devrait croiser juste devant un paquet de furieux au sein desquels on compte notamment quelques uns des meilleurs de la première étape comme Charly Fernbach (Le Fauffiffon Hénaff) ou Armand de Jacquelot (We Van), mais aussi quelques belles surprises comme Edwin Thibon (Cœur Fidèle) ou Mathieu Bourdais (Tous au Large).
En prototype, Frédéric Denis (Nautipark) a fait le trou. Il compte maintenant 40 milles d’avance sur ses adversaires directs, tous recalés dans son sillage. Seuls Jean-Baptiste Daramy (Chocolats Paries) au nord et Simon Koster (Eight Cube) au sud semblent vouloir sortir de la voie tracée par le leader. Difficile, quand l’homme de tête fait les bons choix, de se démarquer sans prendre de risques inconsidérés. Mais c’est parfois le prix à payer pour provoquer la réussite.

Classement du 3 novembre à 18h (TU+1)

Prototypes (Classement Eurovia Cegelec)

  1. Frédéric Denis – 800 – Nautipark à 2195,2 milles de l’arrivée
  2. Jean-Baptiste Daramy – 814 – Chocolats Paries à 41,1 milles
  3. Michele Zambelli – 788 – Illumia à 48,9 milles
  4. Ludovic Méchin – 667 – Microvitae à 53,2 milles
  5. Clément Bouyssou – 802 – Le Bon Agent – Bougeons l’Immobilier à 56,8 milles

Séries (Classement Ocean Bio-Actif)

  1. Ian Lipinski – 866 – Entreprises Innovantes à 2257,9 milles de l’arrivée
  2. Benoît Hantzperg – 871 – YCA Dhumeaux Secours Populaire à 7,5 milles
  3. Julien Pulvé – 880 – Novintiss à 8,7 milles
  4. Tanguy Le Turquais – 835 – Terréal à 45,8 milles
  5. Dimitri Simons – 758 – Teamsolo.nl à 54,9 milles

Source

Mini Transat / Cécile Gutierrez

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