Ça frotte dans le peloton

© Gilles Martin-Raget

A deux jours près, cela faisait un mois que les positions étaient figées dans la Barcelona World Race. Depuis le 21 février, les écarts semblaient stabilisés et mis à part quelques incidents de parcours, rien ne semblait de nature à troubler le bel ordonnancement établi dans le Pacifique Sud. C’était sans compter sur ces galopins de One Planet One Ocean & Pharmaton. Sans aucun complexe, Aleix Gelabert et Didac Costa, bizuths des mers du sud, à bord de l’unité la plus ancienne de la flotte, se sont pris au jeu de la régate pour venir griller la politesse aux frères Garcia à bord de We Are Water. Aleix et Didac, positionnés plus à l’est, bénéficient aussi d’un meilleur positionnement par rapport à l’orthodromie. Il n’empêche : le signal est clair… ces deux-là ne se laisseront pas tondre la laine sur le dos.

L’alizé portugais peu amène

En tête de flotte, Cheminées Poujoulat a pu commencer à in fléchir sa route vers le nord-est. Bernard Stamm et Jean Le Cam prennent leur mal en patience dans un alizé portugais puissant, survitaminé par une petite dépression positionnée à l’entrée du détroit de Gibraltar. Le couloir de vent entre les basses pressions et l’anticyclone des Açores est sujet en outre à de nombreux grains qui pimentent la navigation. Depuis 24 heures, le leader doit composer avec des vents qui oscillent entre 20 et 40 nœuds et une mer hachée qui rend difficile la progression du monocoque jaune et noir. Sous-toilé, le bateau peine à franchir l’obstacle des vagues, trop chargé, il tape fortement, générant le stress de la casse. Heureusement, les deux gaillards ont suffisamment de bouteille pour ne pas se laisser démonter.

Il reste que ces allures de près tapent sur le système de tous les concurrents. C’est ce qu’exprimait Anna Corbella à bord de GAES Centros Auditivos dans un petit mot du jour où la navigatrice catalane exprimait parfaitement le dilemme : ménager le bateau mais pas trop pour arriver à affronter cette mer de face qui demande de la puissance. Heureusement, le fait de faire pratiquement route directe est un puissant réconfort psychologique.

Le Pot au noir, juge de paix

Pour les hommes de l’hémisphère sud, c’est avant tout le franchissement du Pot du noir qui occupe les esprits. Pour les frères Garcia comme pour Aleix Gelabert et Didac Costa, c’est ici que pourrait se jouer la 4e place de l’épreuve. Pour peu que la Zone de Convergence Intertropicale gagne en amplitude et en instabilité, comme les prévisions météo semblent indiquer, tout peut arriver et chaque équipage peut enregistrer des gains, ou des pertes, considérables. Ce n’est pas encore le souci premier de Sébastien Audigane et Jörg Riechers à bord de Renault Captur, ni de Nandor Fa et Conrad Colman sur Spirit of Hungary. Pour ces deux concurrents, la p riorité va être d’accrocher les alizés de sud-est de l’hémisphère sud et de profiter pleinement des dernières heures de l’été austral avant de basculer directement dans le printemps de l’hémisphère nord. Ce n’est pas le moindre des charmes de la Barcelona World Race.

Classement le 19 mars à 14h00 TU :

  1. Cheminées Poujoulat (B Stamm – J Le Cam) à 1333,8 milles de l’arrivée
  2. Neutrogena (G Altadill – J Muñoz) à 982,9 milles
  3. GAES Centros Auditivos (A Corbella – G Marin) à 1124,6 milles
  4. One Planet One Ocean & Pharmaton (A Gelabert – D Costa) à 2077,0 milles
  5. We Are Water (B Garcia – W Garcia) à 2089,9 milles
  6. Renault Captur (J Riechers – S Audigane) à 3468,1 milles
  7. Spirit of Hungary (N Fa – C Colman) à 4693,4 milles

Ils ont dit :

Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) :

C’est mouvementé, mais ça reste du plaisir. C’est un peu du rodéo, mais c’est quand même pas mal. Le vent devrait encore forcir, c’est sûr que c’est un peu contraignant. Devant Gibraltar, il y a une dépression, collée devant Gibraltar, c’est elle qui nous fait ce vent-là. Il va falloir négocier ça avant de passer en Méditerranée. On avance prudemment, mais on avance. Si on commence à réduire pour 37 nœuds, on n’avance plus du tout. Si on réduit pour être toilé comme il faut pour le maximum des grains, on est collé à la pelouse. Forcément, un moment donné, ça charge parce qu’on est surtoilé, mais c’est comme ça. Ça fait partie de la navigation.

Aleix Gelabert (One Planet One Ocean & Pharmaton) :

Le bateau est à 100% de son potentiel. Ce mano a mano avec We Are Water nous motive vraiment. On navigue avec la même tension et la même intensité qu’au premier jour de la course.

Willy Garcia (We Are Water) :

Hier au soir, on a eu un grain avec 25-30 nœuds de vent. Avec le A3 hissé, nous avons dû abattre un peu pendant une heure. On a gagné dans l’ouest, on verra si c’est utile. Je pense que le passage du Pot au noir va être intense. Il fait chaud maintenant, mais les nuits et les soirées sont magiques… S’il n’y avait pas ces voisins qui nous empêchent de nous reposer, haha…

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Barcelona World Race

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