La Route du Rhum : un nouveau défi pour François Gabart

© Christophe Launay

Moins de deux ans après son triomphe sur le Vendée Globe, François Gabart s’élancera, le
2 novembre à bord de MACIF, pour tenter de réaliser un doublé rare : remporter la Route du Rhum. Comme le tour du monde en solitaire, cette transatlantique mythique « était dans l’imaginaire du petit François quand il était gamin et est toujours restée dans ma tête», glisse le Charentais de 31 ans. Deux marins ont réalisé cette passe de deux : Titouan Lamazou, en 1990, en monocoque et Michel Desjoyeaux, en 2000 et 2002, passant du monocoque à un multicoque. L’occasion est belle pour le skipper de MACIF de parachever avec éclat quatre ans de réussite sur son 60 pieds avant de vivre avec son partenaire une nouvelle aventure, en multicoque.

Mesures-tu l’enjeu du doublé Vendée Globe – Route du Rhum, les deux courses mythiques en solitaire ?

C’est toujours intéressant de tenter ce défi ! C’en est déjà un de participer aux courses qui sont à mes yeux les plus importantes de la course au large, celles qui m’ont fait rêver et qui sont dans l’imaginaire collectif. J’ai la chance de pouvoir le faire dans de bonnes conditions et avec un joli bateau qu’est MACIF. Mais ce serait exceptionnel, juste après le Vendée Globe, de gagner la Route du Rhum.

Comment évalues-tu la difficulté de relever ce défi ?

Je vois le projet du 60 pieds MACIF dans sa globalité, sur quatre ans. Jusque-là, on a eu d’agréables surprises, grâce au travail d’une équipe. Mais ce n’est pas simple pour un sportif d’être constant dans les résultats. On l’a vu sur la dernière Transat Jacques Vabre avec Michel (Desjoyeaux, MACIF a démâté, ndlr). Non, enchaîner la performance n’est pas simple mais c’est ce qui est excitant. Le niveau en IMOCA est très relevé. Sur la Route du Rhum, notre flotte est réduite (huit bateaux), il faut être honnête. Mais il y a quelques bateaux de très grande qualité, qui n’ont pas arrêté de naviguer depuis le Vendée Globe. Je dirais même, en me comptant, qu’on a les trois vainqueurs des trois grandes dernières courses avec également Vincent (Riou, sur la Transat Jacques Vabre 2013), Jérémie (Beyou, sur la Solitaire du Figaro 2014).

Quelles ont été tes priorités dans ta préparation ?

Aucune course ne se ressemble. Notre sport évolue, notre préparation aussi. L’idée est d’être acteur, d’être proactif de cette évolution. Du Vendée Globe, il y a des choses transposables à la Route du Rhum, mais il a fallu aller chercher autre chose. Des éléments de notre bateau, qui avait un petit avantage technique avant le tour du monde, ont pu être copiés. Il faut donc réinventer pour essayer de garder cette petite avance. Nous avons atteint un degré de fiabilité très important après le Vendée Globe. Nous avons basculé progressivement vers plus de performances, ce qui a bien marché en 2013. Malgré le démâtage sur la Transat Jacques Vabre, je suis archi-convaincu qu’on a encore progressé. C’est un fait, le bateau MACIF est plus rapide et aussi fiable avant le départ de la Route du Rhum qu’il y a deux ans. Après, cela se jouera sur l’intensité humaine, la façon de gérer le bateau et les manœuvres. Si j’étais en phase de découverte en 2011, je suis plus aujourd’hui dans le détail de la performance. Au niveau physique, j’ai un degré d’exigence qui progresse aussi. En ce domaine, je crois être doté d’un petit avantage sur mes concurrents ; j’espère le conserver et le creuser !

Quel premier bilan tires-tu des oppositions avec tes concurrents lors des entraînements de l’été ?

Sur le papier, quatre bateaux et quatre marins d’expérience sur cette Route du Rhum s’élanceront avec un petit avantage (sur une flotte IMOCA de huit bateaux). Un bateau a bien progressé : celui de Vincent (Riou). Mais les entraînements ne sont pas les courses et nous ne sommes pas dans les mêmes phases de préparation pour la Route du Rhum. On suit chacun notre chemin vers le départ. On regarde évidemment ce qui se passe à côté, mais on essaie de ne pas se disperser. Cet été, j’avais la volonté de beaucoup naviguer, dans la durée, dans la longueur. Je l’ai fait avec Vincent mais aussi tout seul. Il y a eu la phase de validation des modifications apportées l’hiver dernier (nouveaux mât, safrans et quille neuve). On est entré maintenant dans la préparation intensive. Je suis dans mon timing, mon tempo. Et je suis content de notre progression, content de l’état des lieux par rapport à mes adversaires, à mi-chemin dans ma préparation sur l’eau.

La Route du Rhum marque ton retour en mode solitaire qui te réussit, avec deux victoires en deux courses depuis 2011 (la transatlantique B to B et le Vendée Globe). Faut-il y voir un (bon) signe ?

Je me régale de naviguer à nouveau en solitaire… C’est le domaine où j’ai progressé le plus aujourd’hui. Depuis ma victoire dans le Vendée Globe, le temps m’a paru à la fois long et court, car il fut dense, chargé. Mais quand le bateau a été remis à l’eau, le 1er juillet, j’avais vraiment, vraiment, hâte de refaire du solitaire au large. D’avoir eu cette attente a renouvelé mon envie avec force. Ce plaisir est un des facteurs les plus importants de la course. Si le départ de la Route du Rhum avait eu lieu le 15 février 2013, je n’aurais pas eu la même envie. L’essentiel à mes yeux est de m’impliquer à fond. Et peut être encore plus parce que ce sera ma dernière course dans la classe, je voudrais tourner la page IMOCA sur de bons souvenirs. Je suis un compétiteur ; et je pense qu’un bon compétiteur ne doit pas uniquement regarder le résultat mais se concentrer sur l’engagement sportif, physique et mental, sur l’énergie qu’il met dans son dessein. C’est là que je trouve mon plaisir. Et si cet engagement est là, il n’y a pas de raison pour que cela ne fasse pas quelque chose de joli à la fin…

Depuis le Vendée Globe, ton statut a changé. Comment le vis-tu ?

Cela fait plaisir de savoir que tant de gens ont suivi le Vendée Globe et vont suivre la Route du Rhum, que je peux partager cette aventure avec eux. C’est évident que le Vendée Globe a changé beaucoup de choses au quotidien, avec certaines contraintes. Mais c’est ma nature de regarder le côté positif des choses ! Et cela ne me met pas de pression par rapport à un résultat. Je crois que le principe qui est le mien, de m’engager totalement dans la course, est ce que le public attend. Que l’histoire soit belle, c’est important d’abord pour moi, et pour les gens qui me suivent.

# Agenda prévisionnel 2014

Septembre
Du 17 – 24 : François Gabart, parrain du salon du Grand Pavois de La Rochelle – Présence du 60 pieds MACIF du 14 au 20 septembre
Du 26-28 : Trophée / Défi Azimut à Lorient

Octobre
Du 7-9 : Stage IMOCA avec le Pôle Finistère Course au Large
Dès le 24 : présence obligatoire à St-Malo

Novembre
Le 2 : départ de la Route du Rhum

La Rubrique RHUM…

R comme Record : 12 jours 11 heures 58 minutes 58 secondes, le temps de référence en IMOCA réalisé en 2006 par Roland Jourdain. En 2013, François Gabart a fait fondre le record du Vendée Globe à 78 jours. Un autre défi envisageable sur cette Route du Rhum ? « Ce qui m’intéresse avant toute chose, c’est d’arriver avant le deuxième ! Bon, j’ai un peu regardé cela quand même… pour savoir le nombre de caleçons et la quantité de nourriture que j’embarque. On est parti sur quinze jours, avec un peu de rab. Si je peux finir la traversée en moins de quinze jours, ça m’arrangerait pour être certain d’avoir assez à manger. Et si on va trop vite, ce serait dommage de jeter de la nourriture… Mais c’est la météo qui dictera. »

H comme Histoire : celle de la Route du Rhum a débuté en 1978, cinq ans avant la naissance de François Gabart. La course est née d’une grosse colère de Michel Etevenon, qui pour répondre aux restrictions imposées sur la transatlantique anglaise, l’Ostar, lança un principe simple : la Route du Rhum serait ouverte à tout bateau sans contrainte de taille, avec comme juge de paix l’océan Atlantique qui, au mois de novembre, est propice aux tempêtes en Manche et dans le Golfe de Gascogne.

U comme Une : ce sera la première participation de François Gabart à la Route du Rhum, dixième édition.

M comme Milles : 3510 le nombre de milles reliant Saint-Malo à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. Soit quelque 6500 km sur l’orthodromie (la route directe).

Source

WindReport'

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Informations diverses

Mis à l'eau le: 22 septembre 2014

Matossé sous: Course au Large, IMOCA, Route du Rhum

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