Les marins, ces héros…

© Alexis Courcoux

Un peu de répit après ces dernières 24 heures difficiles. Les solitaires, fourbus par les multiples empannages, fatigués par les bascules de vent incessantes, la grosse mer et les grains violents, ont pu se reposer plus de quelques minutes. Si la date d’arrivée approche à grand pas (ETA dimanche 7 avril), la régate reste plus que jamais disputée. Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer), toujours leader, garde un oeil sur son plus proche rival Gildas Morvan (Cercle Vert), et sur ses camarades du nord. Il sait qu’il n’a pas le droit à l’erreur malgré ses 47 milles d’avance. La place de 4e reste toujours en suspens depuis qu’Adrien Hardy (Agir Recouvrement) a perdu son safran tribord hier après-midi. Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) revient comme une balle, il était ce matin bord à bord avec Adrien.

De l’avis de tous les marins, elle est dure cette transat ! Depuis le départ de Brest le 17 mars dernier, les conditions météo, les choix tactiques, le stress de la casse, la pression de la régate ont tiré sur le physique des solitaires. Ce matin à la vacation de 5 heures, les skippers semblaient engourdis, un peu « cramés » au dire de Gildas Morvan, pourtant une force de la nature : « C’est une transat difficile. Tout à l’heure, pendant une heure, j’étais à 30 nœuds établis, on ne voyait rien… On en a bavé quand même. Dans ces conditions, les empannages sont dangereux. Je fais attention, je mets le harnais pour aller à l’avant mais on a vite fait de faire une bêtise. Il faut faire attention ».
Les grains… Ces brusques sautes de vent en force et en direction leur font perdre la tête. Il faut alors reprendre la barre, au pire empanner quand la bascule est trop importante tout en restant sur la route directe, se méfier de la mer qui se lève. « J’ai fait un paquet d’empannages, je ne sais pas combien, mais peut-être une trentaine ! J’ai pris toutes les bascules. Il y a des grains qui lèvent du clapot, quand on empanne ce n’est pas forcément facile de ne pas faire de bêtise. » avouait Erwan Tabarly ce matin. Jusqu’au bout, les alizés vont donner du fil à retordre à toute la flotte. Dans le classement, il risque bien d’y avoir des bascules aussi…. Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012), actuellement 3e, surveille ce qu’il se passe au-dessus et en-dessous : « Gildas (Morvan) et Erwan (Tabarly) sont sur la route à coup d’empannages, ça va être intéressant de voir ce que ça va donner. Il y a Anthony (Marchand) qui fait un beau retour par le nord et qu’il va falloir surveiller. » Le skipper de Bretagne – Crédit Mutuel Performance, l’air de rien, fait en effet une superbe remontée. Au détriment d’Adrien Hardy qui vit des heures difficiles. Il navigue en équilibriste avec son seul safran bâbord. Le pilote ne tient pas la route, Adrien est contraint de barrer quasi en permanence, et se pose des questions quand à son prochain empannage. Malgré tout, il ne veut pas baisser les bras, pas maintenant, à moins de quatre jours de l’arrivée : « Je ne vais pas lâcher le morceau. Je ne vais pas laisser ma place aux autres. Le problème, c’est de se reposer, parce que je n’ai pas une autonomie indéfinie ». Ce matin, les marins forcent notre admiration…

Les cinq premiers à 5 heures

  1. Armor Lux – Comptoir de la Mer (Erwan Tabarly) à 716,69 milles
  2. Cercle Vert (Gildas Morvan) à 47,75 milles
  3. Skipper Macif 2012 (Fabien Delahaye) à 68,87 milles
  4. Agir Recouvrement (Adrien Hardy) à 102,21 milles
  5. Bretagne – Crédit Mutuel Performance (Anthony Marchand) à 102,90 milles…

Ils ont dit :

Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer) :

« Cette nuit c’était plus calme, quelques bascules de vent mais un ciel plus uniforme. J’ai une vingtaine de nœuds de vent, toujours sous spi. J’ai pu me reposer un peu. On peut se reposer mais pas au mauvais moment pour ne pas tirer les mauvais bords. L’ ETA c’est dimanche matin entre 3h TU et 5h TU pour les routages, mais j’ai l’impression qu’on va mettre un peu plus de temps… Cette nuit je n’ai pas cherché à contrôler Gildas (Morvan) parce que de toutes façons on avance quasiment à 10 nœuds tous les deux, ça fait 80 milles d’un bord ou de l’autre. Je me suis concentré à prendre les bascules dans le bon sens. J’ai quand même fait un paquet d’empannages, je ne sais pas combien, mais peut-être une trentaine ! »

Gildas Morvan (Cercle Vert) :

« C’est un peu plus calme que la nuit d’hier. Le vent est un peu plus stable, un peu moins fort et ça permet de mettre le pilote régulièrement pour aller dormir. Le vent bouge sans arrêt donc il faut suivre. En général ça mollit un peu et juste après on empanne. J’ai bien peur que ce soit comme ça jusqu’à l’arrivée. Le bonhomme était très fatigué hier après-midi. J’étais cramé. Depuis cette nuit, j’ai bien récupéré, ça c’est pas mal. C’est une transat difficile. Tout à l’heure, pendant une heure, j’étais à 30 nœuds établis, on ne voyait rien… On en a bavé quand même. Dans ces conditions les empannages sont un peu dangereux. Je fais attention, je mets le harnais pour aller à l’avant mais on a vite fait de faire une bêtise. Il faut faire attention ».

Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) :

 » Pour moi c’est calme, je n’ai pas beaucoup de vent par rapport à mes petits copains du nord je pense. J’avais peur qu’on ait une nuit comme la précédente mais finalement c’était étoilé sans nuage. Je ne fais que me reposer depuis le coucher du soleil et même un peu avant. Ca fait du bien. Il était temps de s’organiser un peu et de se reposer. J’essaie de suivre un peu les oscillations, ce n’est pas facile parce que la mer n’est vraiment pas bonne. J’ai essayé de suivre mais au final c’était très compliqué d’essayer de gagner un petit peu. Du coup, je suis plus dans l’optique d’aller chercher quelque chose sur le long terme.

Adrien Hardy (Agir Recouvrement) :

 » C’est dur ! C’est surtout dur parce que la course va être encore plus rude. Le bateau ne va pas droit du tout et c’est fatiguant, c’est stressant. Ca fait déjà maintenant 48 heures que je n’ai pas beaucoup dormi. J’ai du mal à me reposer et d’un côté je n’ai pas envie de lâcher le morceau. J’ai passé des heures à gagner du terrain et je veux me battre parce que je sais que malgré cette avarie il y a encore quelque chose à jouer. Le safran s’est ouvert en deux. J’aurais pu le garder à poste, le bateau aurait été plus facile à contrôler mais j’aurais gardé un truc dans l’eau qui m’aurait ralenti énormément et j’ai quand même encore envie d’avancer. Je suis content d’avoir réussi à l’enlever parce que ce c’était pas gagné dans ces conditions. Le problème c’est que le bateau a tendance à partir à l’abattée. C’est assez dur de barrer dans ces conditions et sur l’autre bord ça va être encore pire. Là il y a 28 nœuds, c’est chaud. J’essaie de rentrer à l’intérieur pour me reposer. Je m’allonge deux minutes et il faut y retourner. C’est un peu la souffrance. »

Source

Rivacom

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