Embûches et stress

© Jean-Pierre Dick / Virbac-Paprec

Jusqu’à l’arrivée tout peut arriver. Les marins du Vendée Globe le savent bien. Les bonshommes sont fatigués, les bateaux souffrent des nombreux milles parcourus. La peur de casser a envahi les cockpits des neuf IMOCA encore en course. Jean-Pierre Dick, Tanguy De Lamotte et Alessandro di Benedetto sont directement concernés…
L’histoire est en passe de bien se terminer pour Jean-Pierre Dick. Le marin niçois a quitté ce matin son abri espagnol pour rentrer à la maison. Au classement de 16 h, Paprec Virbac 3 sans quille a retrouvé du vent et file à 9 nœuds cap au 20°. ETA prévue : demain lundi à 20 heures.

Rencontre avec un OFNI

Pour Tanguy de Lamotte, c’est une autre histoire, du même genre, cauchemardesque. Alors qu’il dormait, à 2 heures TU la nuit dernière, le skipper d’Initiatives-Cœur entend un grand bruit et dans le même temps sent un choc violent contre la coque. Un objet flottant a détruit sa dérive bâbord et coupé en deux son safran tribord. Il expliquait sa situation au Live ce midi : « C’est la dérive qui a pris le premier impact, elle est complètement penchée vers l’arrière et a explosé le puits de dérive. Il y a du coup de l’eau qui rentre dans le bateau. Je n’avance pas à très grande vitesse et cela me permet de retirer l’eau rapidement et de protéger mon matériel électrique. La situation est sous contrôle mais il faut absolument que je trouve une solution pour enlever ma dérive et ensuite boucher le trou ». Tanguy, actuellement à plus de 900 milles dans l’ouest du Sénégal, a passé plusieurs heures à la cape (à l’arrêt) pour faire le tour de la situation. Il est reparti en milieu de journée à faible vitesse (3,7 nœuds au dernier classement).

La situation pour Alessandro di Benedetto est moins grave, disons embêtante et risque de freiner sa remontée jusqu’aux Sables d’Olonne. Ses voiles de portant sont désormais inutilisables. Les réparations qu’il a tentées n’ont pas tenu. Team Plastique au portant sera privé de ses ailes…

Concentration dans la dernière ligne droite

Ne pas se relâcher, rester concentré sur sa course, sur la bonne marche du bateau. Jean Le Cam l’avouait ce matin : « L’arrivée viendra en temps voulu, pour l’instant je suis dans ma course. » Le breton et l’Anglais Mike Golding, avec leurs options radicalement différentes restent muets quant à l’explication de leurs choix tactiques. On avance, on avance, et la différence se fera quelques milles à l’approche de l’arrivée.

Derrière, de Dominique Wavre à Bertrand de Broc, en passant par Arnaud Boissières et Javier Sanso, on réfléchit, on soupèse le pour et le contre entre l’ouest et l’est de l’anticyclone. Les skippers sont quelque peu tendus dans des conditions tordues : « On a toujours peur de la casse surtout quand on est face aux vagues, on sent que le bateau souffre mais Mirabaud a été bien préparé, pour le moment il tient le coup et je suis fier de lui. » racontait Dominique Wavre. Bertrand de Broc, lui-aussi, veut ramener son IMOCA en bon état : « Ce n’est pas le moment de casser, il ne faut pas trop tirer dessus, il a déjà navigué 80 jours ».

En bref

ETA au 3 février

  • Jean-Pierre Dick, le lundi 4 février 20 heures
  • Jean Le Cam le mercredi 6 février matin
  • Mike Golding 7 heures plus tard
  • Bernard Stamm (hors course) le 6 février milieu de journée
  • Dominique Wavre et Arnaud Boissières le vendredi 8 février soirée
  • Javier Sanso le 9 février fin d’après-midi
  • Bertrand de Broc le 12 février

Encore en mer au 03/02 – 16h00

4 – Jean Pierre Dick
[Virbac-Paprec 3]
à 258,3 milles de l’arrivée

5 – Jean Le Cam
[ SynerCiel ]
à 590,6 milles de Virbac-Paprec 3

6 – Mike Golding
[ Gamesa ]
à 652,5 milles

7 – Dominique Wavre
[ Mirabaud ]
à 864,7 milles

8 – Arnaud Boissières
[ AKENA Vérandas ]
à 983,9 milles

Ils ont dit

Jean-Pierre Dick (FRA, Virbac-Paprec 3)

Le bateau se comporte comme avant, le plus fort de la tempête est passé et je pense que c’était une bonne chose de s’arrêter. Je devrais arriver dans l’après-midi de lundi mais j’ai beaucoup de mal à prévoir car je connais mal le bateau dans cette configuration-là. Par ailleurs, j’ai dû déplomber le moteur pour atteindre le mouillage donc j’attends les réactions du jury. J’espère que l’aspect sécuritaire de la manœuvre prendra le dessus sur leur décision.

Dominique Wavre (SUI, Mirabaud)

Le vent passe de 10 à 25 nœuds en quelques minutes depuis 6h ce matin, donc je suis en réglages continus. C’est une zone assez étonnante que je traverse. Pas question de fermer l’œil, le vent est de face, c’est difficile de progresser et le bateau peut s’arrêter à n’importe quel moment. Je laisse le pilote travailler et moi je m’occupe des réglages de voile. Il faut économiser le bonhomme. Les fichiers me font aller tout droit, vers le nord, mais le vent est tellement instable que je ne sais pas encore par quel côté de l’anticyclone passer. Je me donne jusqu’à cet après-midi pour prendre une décision, quand je serai au niveau des Açores. Le vent va décider pour moi au dernier moment.

Mike Golding (GBR, Gamesa)

Le routage se présente un peu mieux pour moi ce matin. Nous sommes très proches avec Jean. Je pense que son routage est le plus sûr, mais comme il y a une autre grande dépression qui arrive, il va peut être se retrouver en difficulté. Il est étrangement silencieux en ce moment, vous ne trouvez pas ? Il me manque une voile et théoriquement cela aurait pu être un problème, mais étant donné les prévisions météo, ça devrait aller. J’ai réussi à le cacher avec un certain succès depuis le début de l’océan Austral. Personne ne l’a remarqué. J’ai perdu mon code zéro dans un incident dans le sud. J’ai un bon génois et je devrais m’en sortir.

Tanguy de Lamotte (FRA, Initiatives-Cœur)

A 2h du matin UTC hier, à 10 nœuds au près dans 18 nœuds de vent, j’ai tapé quelque chose de très dur. Je suis sorti rapidement sur le pont mais je n’ai rien vu. Il y a eu 2 impacts : le safran tribord, qui était déjà endommagé, est cassé en deux. Je n’en ai plus que la moitié, ce qui n’est pas trop grave pour l’instant car j’ai beaucoup de bâbord amures à faire. L’autre dégât, beaucoup plus important, concerne la dérive bâbord, qui était descendue. C’est elle qui a pris le premier impact, elle est complètement penchée vers l’arrière et a explosé le puits de dérive, ce qui fait une voie d’eau. La quille de la dérive est bloquée donc je n’arrive plus à la faire bouger. J’ai essayé de la remettre un peu à la verticale en sautant dessus après avoir fait gîter le bateau pour la sortir au maximum, mais je n’y arrive pas. J’ai repris ma route en tribord histoire de réfléchir et de me reposer, mais je vais bientôt me remettre en bâbord amures pour la tirer vers l’arrière avec une drisse. Comme la dérive est à 75° vers l’arrière, ce sera plus simple de la tirer vers le haut plutôt que vers l’avant comme j’ai essayé avant. Je pense pouvoir la dégager du puits de dérive et la ramener à bord avant qu’elle n’abîme la coque. Ça va être dur: 70 kilos, 2,50 mètres de long. Ensuite il faudra boucher les trous pour colmater la voie d’eau.

Bertrand de Broc (FRA, VNAM avec EMD Projets)

Les conditions sont très changeantes, le vent varie beaucoup en direction, jusqu’à 40° et en force, de 10 à 20 nœuds. Ce n’est pas très simple à gérer Mais je suis dans une zone intermédiaire, ça devrait changer en fin de journée. On est au près, il faut faire attention au bateau. Chacun essaye de choisir la meilleure route mais pour le moment je fais en sorte de ramener le bateau en bon état. Ce n’est pas le moment de casser, il ne faut pas trop tirer dessus, il a déjà navigué 80 jours.

Source

Vendée Globe

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