Un dimanche de retrouvailles

© Mike Golding / Gamesa

Plus que 20 heures de course. Dimanche matin, si tout va bien, François Gabart devrait en finir avec son premier tour du monde en solitaire sans escale et sans assistance. Un final en apothéose, où le vainqueur devra d’abord triompher des derniers écueils météo qui s’élèvent sur sa route. Armel Le Cléac’h, attendu entre 3 et 6 heures plus tard, sera à la même enseigne.

Bientôt le pied à terre

Les marins ont-ils le pied terrien ? A l’arrivée, souvent, ils vacillent. Sur les pontons, dans l’émotion. Pendant deux mois et demi, leur pied-à-terre s’est limité à un réduit de moins de 9 m2 dont une partie n’était accessible qu’à quatre pattes. Une petite tanière en carbone, mal isolée, en perpétuel mouvement. La cuisine ? Un réchaud. Les toilettes ? Un seau. La chambre ? Un pouf à billes. Les relations humaines ? Dématérialisées. L’environnement ? Un désert liquide.
En l’espace de quelques minutes, au moment où MACIF s’amarrera au ponton de Port Olona, François Gabart, 29 ans, va basculer d’un monde à l’autre. Un électrochoc chargé de sensations fortes, positives. Et qui met d’un coup en lumière toute l’âpreté et la beauté du voyage accompli.
Cerise sur le bateau : c’est en vainqueur que le benjamin de la flotte sera accueilli.
Mais avant les bravos dans le chenal des Sables d’Olonne, il devra d’abord passer un ultime examen. Un dernier « run » un peu sauvage à 20 nœuds de moyenne, dans un golfe de Gascogne agité par une mer croisée, puis le rapide passage d’un front en milieu de matinée, décochant ses rafales à 40/45 nœuds. Armel Le Cléac’h, attendu entre 3 et 6 heures plus tard dans le port d’arrivée, sera soumis au même régime. Brillant dauphin et inséparable compagnon d’arme de François, le skipper de Banque Populaire a été l’autre grand patron de la course qu’il a animée par ses coups tactiques. Il sera ovationné avec autant de ferveur que le lauréat.

Alex au grand cœur

Dimanche soir, pendant que les deux premiers fêteront sur la terre ferme les retrouvailles avec leurs proches, il restera encore 10 solitaires en course.

Parmi eux, l’homme qui complètera le podium de ce 7e Vendée Globe. Depuis l’avarie de quille de Virbac-Paprec 3, cette 3e place est promise à Hugo Boss. Hier soir, Alex Thomson a pris une noble décision : escorter, un temps, Jean-Pierre Dick. Des Açores à la ligne d’arrivée, la météo se corse pour les deux hommes qui affrontent les mêmes vents que les leaders. Mais avec une mer encore plus difficile. Dans ce contexte, le marin britannique a estimé qu’il ne pouvait pas laisser son compagnon de route sans ange gardien, au moins le temps que ce dernier évalue sa situation. Cette décision, Alex l’a prise spontanément, sans qu’il y ait demande d’assistance de la part de Jean-Pierre ou de l’organisation du Vendée Globe. Une initiative pleine de panache. Aujourd’hui, Dick fait cap vers les côtes portugais

Classement au 26/01 – 16h00

  1. FRANCOIS GABART
    [ Macif ]
    à 361,2 milles de l’arrivée
  2. ARMEL LE CLEAC’H
    [ Banque Populaire ]
    à 112.1 milles du leader
  3. ALEX THOMSON
    [ Hugo Boss ]
    à 925.4 milles du leader
  4. JEAN PIERRE DICK
    [ Virbac Paprec 3 ]
    à 934.5 milles du leader
  5. JEAN LE CAM
    [ SynerCiel ]
    à 2466.7 milles du leader

Ils ont dit

Jean-Pierre Dick (FRA, Virbac Paprec 3)

Le vent est monté toute la nuit. Maintenant j’ai entre 25-30 nœuds, une mer assez formée et des vagues de 3-4m de haut. Le bateau se comporte correctement dans la vague et je suis plutôt surpris. C’est de bon augure pour la suite des événements. J’attends un tout petit plus de vent dans l’après midi et ensuite il va mourir doucement dans la nuit. (A propos de sa décision de poursuivre ou non la course) J’ai avancé dans ma réflexion. Je ne vais pas m’arrêter aux Açores. Par contre, je n’ai pas encore décidé d’aller complètement jusqu’aux Sables. Je vais me rapprocher des côtes portugaises pour analyser au mieux les éléments. Vers le 28-29 janvier, je pourrai décider de ce que je fais. En ce moment, je pense que toutes les conditions sont réunies pour que j’aille jusqu’au Portugal. Je suis plutôt dans une idée de rapatriement à long terme que de recherche de vitesse. (Sur le soutien d’Alex Thomson) C’est vraiment sympa de la part d’Alex. C’est un acte de courage parce qu’il s’est dérouté. Ce n’est pas facile pour lui parce qu’il est dans sa course aussi. Quelque part, je suis fier de lui donner ma troisième place. C’est un beau geste de marin de venir me soutenir au premier coup de vent.

Tanguy de Lamotte (FRA, Initiatives-cœur)

Tout va bien, j’ai eu un petit trou de vent ce matin mais c’est revenu dans la bonne direction et c’est plutôt agréable. Ça ventile un peu le bateau. Par contre, je n’ai pas pu plonger (rires). (Sur sa baignade de vendredi) J’ai eu une zone sans vent du coup, j’ai pris mon maillot, un masque et je suis allé voir mon safran. J’en ai profité pour faire un check complet et aussi profiter de l’eau. C’était extraordinaire de voir mon bateau de l’extérieur en plein milieu de l’océan. Ça fait penser aux vacances. Ça m’a fait beaucoup de bien car je savais que ça allait être rafraichissant. Je n’avais pas pris la commande du bateau mais uniquement les caméras. En deux jours, je serai allé du haut du mât en bas de la quille, c’est plutôt sympa.

Michel Desjoyeaux (navigateur)

(Sur les sensations avant d’arriver) C’est important d’être dans sa bulle avant l’arrivée et si vous voulez qu’ils aient quelque chose à raconter demain, il faut les laisser un peu tranquille (rires). Ils doivent se préparer à basculer intellectuellement au retour à la civilisation et il faut leur laisser le temps de gérer ça.

Marc Guillemot (navigateur)

(Sur l’arrivée) Le retour sur terre est assez violent mais en même temps, on l’apprécie. On n’est jamais aussi en forme que le jour d’une arrivée de Vendée. On est tellement bien et tellement porté que rien que pour ça, ça vaut le coup de faire le Vendée Globe. Mais c’est vrai qu’ensuite, il faut 3-4 mois pour s’en remettre. (Sur l’aide d’Alex Thomson à Jean-Pierre Dick) Le Vendée Globe, c’est aussi ça. Je trouve ça génial ce que fait Alex. C’est très fort et très intelligent de sa part.

Alex Thomson (GBR, HUGO BOSS)

Les prévisions météo annonçaient des vents violents, j’étais à 90 milles de JP et je ne m’imaginais pas le laisser dans de telles conditions à bord d’un bateau sans quille. Et puis pour moi, franchement, ce n’est pas un énorme effort. Mais vu que j’ai déjà été secouru par le passé, je sais à quel point c’est important d’avoir quelqu’un qui surveille vos arrières au cas où. Je vais accompagner JP jusqu’à ce qu’il soit 100% sûr que son bateau tiendra. Actuellement, j’ai 20-25 nœuds de vent venant du sud-ouest et la mer n’est pas trop mauvaise. Je navigue avec deux ris et solent.

Dominique Wavre (SUI, Mirabaud)

L’équateur, c’était super. Le lever du soleil était magistral, il y avait des couleurs exceptionnelles. Je voulais absolument partager ça avec vous (ndlr : il a envoyé une vidéo) surtout que les conditions vont changer. J’ai devant moi une grosse barrière nuageuse qui devrait me bloquer dans l’après-midi. Demain, nous verrons si le pot au noir a été clément pour moi. (Sur son passage dans l’Atlantique nord) Pour l’instant, c’est assez limpide sur les dix prochains jours pendant lesquels je devrais rester sur le même bord puis ensuite gérer l’anticyclone des Açores. Mais ça se dessine bien. (A propos de l’arrivée des leaders) Quand les leaders arrivent, ce n’est pas facile pour nous car on a l’impression que la course est terminée. C’est vrai que ça fait bizarre de se dire que certains seront déjà sous la douche pendant que nous, nous serons encore en mer. Je peux vous dire que ce sentiment est assez bizarre et il faut bien garder en tête que l’on est toujours en course.

Alessandro Di Benedetto (FRA-ITA, Team Plastique)

J’essaie de faire de mon mieux avec le bateau, de résoudre les problèmes qui se présentent et d’avancer aussi vite et bien que possible. Le soutien du public est très important pour moi, merci beaucoup. C’est génial de voir qu’autant de gens qui s’intéressent au Vendée Globe, une course qui veut dire beaucoup pour moi et pour tant d’autres marins.

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