Rafale de passages au cap Horn

© Dominique Wavre / Mirabaud

L’actualité se bouscule en ce 60e jour de mer avec un véritable défilé au cap Horn. D’ici ce soir aux alentours de 22 heures, 5 concurrents auront franchi la longitude du 67°17’21’’. Pendant ce temps, à l’avant, MACIF et Banque Populaire se rapprochent du centre de l’anticyclone de Sainte Hélène.

Les trompettes du Horn ne vont pas arrêter de retentir ce mercredi, comme pour fêter ces 2 mois de course. Et ce sont celles de la renommée pour Mike Golding (Gamesa) qui fête son 6e passage (dont trois à l’envers !) et son poursuivant Dominique Wavre (Mirabaud), le vétéran, pour qui c’est le 9e Horn en course : un record toute catégorie. « On navigue sur un cimetière à bateaux et j’ai un respect énorme pour tous ces marins qui nous ont précédé ici » déclarait le navigateur suisse.

Stamm va annoncer son abandon

Pour son compatriote Bernard Stamm, 3e à doubler le rocher à 12h49mn TU (13h49 heure française), cette étape marque le commencement d’une aventure différente. La rencontre avec son « bateau ravitailleur » Pakea Bizcaïa a bien eu lieu. Cheminées Poujoulat a reçu du carburant et est arrêté au mouillage sous le vent de l’île du Horn, au nord du phare qui signale ce petit bout du monde. Une fois ses batteries rechargées, il signifiera son abandon et reprendra la route vers les Sables d’Olonne, hors course.
Ce soir, ce sera au tour d’Arnaud Boissières (AKENA Vérandas) et de Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) de mettre le clignotant à gauche. Bientôt ils ne seront plus que trois bateaux à dévaler les pentes liquides du Pacifique.
Bertrand de Broc (Votre Nom autour du Monde avec EDM Projets) et Tanguy de Lamotte (Initiatives-cœur) viennent d’y vivre des moments difficiles. Ce dernier a mis des heures à se remettre de la récupération de son reacher dans l’eau (suite à une rupture de drisse). Une opération exténuante qui l’a complètement lessivé. Le ton éternellement jovial d’Alessandro Di Benedetto ne cache pas ses soucis domestiques: après le démontage intégral du moteur de Team Plastique, il est intervenu sur sa grand voile pour changer un boîtier de latte.

60 jours, c’est long et c’est court

Déjà deux mois de mer. Cela paraît si long. Mais pour les marins dont le quotidien est rythmé par la performance et l’entretien du bateau, le temps, finalement, ne suspend jamais son vol. Dominique Wavre, émerveillé par son passage du Horn au milieu d’une joyeuse bande dauphins, se voyait presque rester là indéfiniment. « C’est quand même assez fabuleux d’être autonome sur nos voiliers, on fabrique notre propre énergie, on a l’impression qu’on pourrait continuer encore des mois et des mois comme ça. La vie est d’une très grande densité sur ce genre de course et le temps passe vite». Bien sûr, ils rêvent tous d’une douche chaude, de courir, d’engloutir un copieux steak-frite ou d’embrasser leurs proches. Mais la plupart vivent leur voyage dans l’épanouissement.

« Ça part de là, on ne lâche rien ! »

En tête de course, en pleine traversée au près de l’anticyclone de Sainte-Hélène, François Gabart (MACIF) a pris un petit ascendant sur son dauphin. 100 milles très exactement. Le skipper de Banque Populaire doit regretter son décalage dans l’ouest opéré il y a quelques jours, car il s’est transformé en écart en distance au but. Mais ses proches et ses adversaires vous le diront tous : Armel Le Cléac’h n’est pas du style à baisser les bras au moindre contretemps. Dans quelques heures, les deux hommes, qui ont déjà ralenti, devront virer dans l’axe de la dorsale. A quel moment déclencher cette manœuvre ? Théoriquement, le plus tard possible (cela permet de ressortir avec un meilleur angle) mais il y a toujours un risque de se retrouver encalminé… Un fois ce virement effectué, ce sera sus aux alizés !

Dans le sud-est de Rio, par 30 degrés sud, les températures commencent à redevenir agréables : elles frôlent les 20 degrés. Pour l’occasion, Armel a ressorti sa tenue printemps/ été 2013. Et c’est en short, T-shirt, lunettes de soleil et crème protectrice qu’il s’attèlera bientôt à sa nouvelle mission : revenir au contact de son meilleur ennemi.

Les chiffres

  • François Gabart (MACIF) a doublé le cap Horn le 1er janvier 2013 à 18h20 TU (19h20 heure française) après 52j 06h 18mn de course.
  • Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) a doublé le cap Horn le 1er janvier 2013 à 19h35 TU (20h35 heure française) après 52j 07h 33mn de course.
  • Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec 3). Passage cap Horn : le 3 janvier à 04h42 TU après 53j 16h 40 mn de course.
  • Alex Thomson (Hugo Boss). Passage cap Horn : le 4 janvier à 02h38 TU après 54 j 14h 36 mn de course.
  • Jean Le Cam (SynerCiel). Passage cap Horn le 8 janvier à 7h19 TU après 58j 19h 17mn et 14s de course soit 6 jours 12 h 58 m 20 s après MACIF.
  • Mike Golding (Gamesa). Passage cap Horn le 9 janvier à 2h05 TU après 59j 14h 03 mn de course.
  • Dominique Wavre (Mirabaud). Passage cap Horn le 9 janvier à 10h18 TU après 59j 22h 16mn de course.
  • Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat). Passage cap Horn le 9 janvier à 12h49 TU après 60j 00h 47mn de course.

Classement au 09/01 – 16h00

  1. François Gabart
    [ Macif ]
    à 5 034.5 milles de l’arrivée
  2. Armel Le Cléac’h
    [ Banque Populaire ]
    à 100.3 milles du leader
  3. Jean-Pierre Dick
    [ Virbac Paprec 3 ]
    à 444 milles du leader
  4. Alex Thomson
    [ Hugo Boss ]
    à 570.4 milles du leader
  5. Jean Le Cam
    [ SynerCiel ]
    à 1 676.5 milles du leader

Ils ont dit

Armel Le Cléac’h (FRA, Banque Populaire)

Je suis rasé, c’est ma tenue printemps été 2013. Les températures sont bien meilleures depuis deux ou trois jours, on sent qu’on a gagné quelques degrés. Ça grimpe un peu, on enlève les polaires et autres tenues qu’on avait dans les mers du Sud. On est en short, les lunettes de soleil sont de sortie. Deux mois de course, ça a été assez intense depuis le départ des Sables, il s’est passé beaucoup de choses, le rythme a été assez soutenu. On a encore un bon bout de chemin devant nous donc on va essayer de continuer comme ça jusqu’à l’arrivée. On va faire le maximum pour être là avant la fin du mois et vous offrir une belle course jusqu’au bout.

Dominique Wavre (SUI, Mirabaud)

Je suis carrément content, c’est absolument super. Ça s’est fait pratiquement sans que je le voie (le rocher du cap Horn). Je viens de le voir il y a cinq minutes mais avant, il était complètement couvert par le mauvais temps. Et j’ai eu droit à un vrai cadeau, des dauphins sont venus me visiter juste au moment où je passais le cap. C’était un cadeau fabuleux. Ça fait partie des grands moments que l’on vit. C’est la 9e fois que je passe ici, c’est toujours extraordinaire. Il y a tout un arrière plan historique. On navigue dans un cimetière à bateaux, les marins qui passaient par là passaient dans des conditions extrêmement difficiles et ça a généré énormément de naufrages. J’ai un respect énorme pour tous les marins qui nous ont précédés ici. Ça fait partie de ce qu’on ressent lorsqu’on passe au large de ce caillou incroyable. Le niveau de stress est forcément très élevé, vu le boucan, les conditions, la manière dont on est secoué, les risques d’avarie, c’est très important d’arriver à le tempérer et à le gérer. D’autre part, c’est couplé avec le sommeil. Impossible de dormir si t’es trop stressé. Il faut arriver à diminuer son niveau de stress pour avoir des petits moments de sommeil pour récupérer et garder un niveau de lucidité correct. Cet équilibre n’est pas très facile à trouver mais le fait d’y arriver te donne une très grande satisfaction personnelle et permet de repousser un peu ses limites.

Bruno Retailleau, Président de la SAEM Vendée

Le temps passe très vite et on s’apprête à recevoir les skippers aux Sables. Le Vendée Globe était annoncé sous les auspices de la crise, on s’attendait à n’avoir peut-être que 12 ou 13 bateaux mais c’était l’édition de tous les records et on est bien parti pour le record de 80 jours, on l’espère.

Tanguy de Lamotte (FRA, Initiatives-Cœur)

(A propos de son problème de drisse) C’était un moment difficile. Ça a duré quelques heures. Là je mets à peu près quatre fois le temps que ça m’a pris pour ramener la voile à bord à récupérer de mon effort. C’est vraiment une dépense énergétique assez énorme. Ça a été difficile mais j’ai réussi et maintenant je récupère. En ce qui concerne le bilan, tu m’aurais demandé hier, je t’aurais dit c’est parfait. Maintenant il y a une petite ombre au tableau, mais je suis quand même assez content parce que j’arrive à aller à la même vitesse que Bertrand. La petite ombre au tableau est assez relative car je sais que je vais pouvoir réutiliser cette voile. Pour l’instant ça me ralentit un petit peu mais ce n’est vraiment pas trop mal, je suis heureux d’être encore en course dans cet état-là.

Emmanuel Petit, Champion du Monde de Foot 1998, invité au Live

Je suis la course mais je ne suis pas un expert. Les marins sont un peu les héros des temps modernes, on est aux antipodes du sport business. Il y a un petit côté mystique qui m’attire beaucoup chez les marins. C’est un esprit de folie, c’est une lutte perpétuelle entre l’homme et les éléments. C’est presque suicidaire, se retrouver tout seul avec la fatigue en plus. Il faut avoir énormément de courage, je suis admiratif.

Source

Liliane Fretté Communication

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