Premier à atteindre la longitude du cap des Aiguilles (longitude de 20°E), marquant le véritable passage dans l’océan Indien, Cheminées Poujoulat a attrapé le bon train. Après un ralentissement provisoire aujourd’hui, Jean Le Cam et Bernard Stamm devraient continuer à mener le convoi dès demain, dans un flux plein ouest de 30-35 nœuds. Avec une avance certaine sur Neutrogena et GAES Centros Auditivos. Dans le peloton, si Renault Captur allonge la foulée, les autres IMOCA 60 rencontrent encore des conditions récalcitrantes à leur plongée vers le Grand Sud.
L’évocation du cap de Bonne-Espérance enflamme toujours l’imaginaire des terriens. Là, enfin véritablement un peu plus à l’est, au cap des Aiguilles, s’entrechoquent deux titans, l’océan Atlantique et l’océan Indien, avec chacun leur courant, l’un chaud, l’autre froid. Rencontre qui parle de tumult es, de vents tempétueux et de mers chaotiques. Pour un tourdumondiste, il évoque le début d’un deuxième tiers du voyage, le plus extrême et espère-t-il le plus rapide. Pour cela, il doit attraper le train des dépressions des mers du sud, flirter avec la bordure nord d’une des tempêtes de la zone subpolaire où les vents d’ouest le pousseront directement vers l’est, et l’ultime cap, le Horn.
Routine d’ici bas
Cheminées Poujoulat connaît la rengaine. Bernard Stamm et Jean Le Cam ont ouvert la voie ce matin, à 9h35 TU, du convoi de la Barcelona World Race, soit après 24 jours 21 heures et 35 minutes de mer, soit quelque 39 heures de moins que le temps mis lors de la précédente édition par Virbac-Paprec 3, qui avait dû faire escale à Recife. Dans leur foulée débridée, en bordure d’un système dépressionnaire costaud, Neutrogena devait suivre, ainsi que GAES Centros Auditivos, Anna Corbella et Gerard Marin commettant les moyennes les plus véloces ces dernières heures. Aucun ne devrait manquer ce flux d’ouest de 30-35 nœuds, conditions de routine ici bas, des deux prochains jours.
Renault Captur a accroché par sa façade ouest le système, et l’allongement de ses foulées laisse présager que Jörg Riechers et Sébastien Audigane ne seront pas détachés des bons wagons. Il pourrait en être de même pour We are Water qui devrait bénéficier d’un vent de nord-ouest plus soutenu. Pour One Planet One Ocean & Pharmaton, pris dans la nasse, et pour Spirit of Hungary, qui mange également son pain blanc, la patience est de rigueur.
Une seule zone d’exclusion pour tous
Quelque soit le train pris, le parcours et ses règles restent les mêmes pour les usagers. Ainsi, la direction de course a informé hier les skippers de la modification de quatre points de la zone d’exclusion, en raison de la dérive possible de gl aces plus au nord que prévu au moment du passage des derniers de la flotte. Ceux-ci comptent actuellement dix à douze jours de retard. Ces quatre points se situent au nord de l’archipel des Crozet, remontés désormais à 43°S pour l’un et 44°S pour les autres.
« Grâce aux images satellites et les informations locales, une mise à jour est effectuée tous les jours par CLS et Marcel van Triest et il s’avère que de gros tabulaires de 800 mètres plus au sud se morcellent en éventail. Les logiciels nous montrent un risque de glaces pour le passage des derniers dans la zone », explique Jacques Caraës, le directeur de course. « Nous l’intégrons dès maintenant, en respectant l’obligation de délai d’information aux premiers bateaux, pour que tout le monde court avec la même zone d’exclusion. »
Classement à 14h00 TU :
- Cheminées Poujoulat (B Stamm – J Le Cam) à 17 579 milles de l’arrivée
- Neutrogena (G Altadill – J Muñoz) à 167 milles
- GAES Centros Auditivos (A Corbella – G Marin) à 563 milles
- Renault Captur (J Riechers – S Audigane) à 1096,6 milles
- We Are Water (B Garcia – W Garcia) à 1582 milles
- One Planet One Ocean & Pharmaton (A Gelabert – D Costa) à 2048,7 milles
- Spirit of Hungary (N Fa – C Colman) à 2563,7 milles
Jörg Riechers (Renault Captur) :
Il fait froid, de plus en plus froid chaque jour. Nous sommes passés de 15-20 nœuds de vent et 30°C de température extérieure à 30 nœuds et 3°C et donc, nous sommes passés des shorts et tongs, aux bottes et polaires. Nous avons entre 30 et 35 nœuds , nous naviguons avec un ris dans la grand voile, le solent, donc c’est assez facile pour le moment. C’est ce que nous attendions, nous y sommes préparés. C’est une autre façon de naviguer maintenant. La première des difficultés devrait venir avec l‘anticyclone de Madagascar qui pourrait bloquer les premiers bateaux dans les dix prochains jours. Cela peut être l’occasion pour nous d’attaquer plus, et si nous avons un peu de réussite… Mais nous devrons bien naviguer pour revenir sur GAES car c’est un bateau vraiment rapide et ils naviguent vraiment bien.
Sébastien Audigane (Renault Captur) :
Le bateau va bien. Nous avons réparé ce qu’on avait à réparer et on navigue pas loin du maximum maintenant. Cela n’a pas changé notre mode de vie, on fait des quarts de deux heures et pour les manœuvres, nous sommes ensemble sur le pont. Par contre, on dort un peu plus car on a fini nos petites réparations. Ce sont de longs bords de portant dans la brise, il n’y a pas grand chose à faire à part aller vite, et vérifier la météo et la navigation. On en profite pour se reposer.
Aleix Gelabert (One Planet One Ocean & Pharmaton) :
Nous devons rester patients. Un système de hautes pressions devrait nous passer dessus avant de toucher du vent plus fort, qui devrait nous permettre de faire route vers l’est et le sud. Nous ressentons du respect pour les océans du sud. Parce qu’aucun de nous n’a navigué dans ces mers, ce sera une première. Nous en avons parlé avec beaucoup de gens qui y sont allés. Mais vous ne savez jamais vraiment ce que c’est avant d’y être allé vous mêmes. Le bateau est assez performant, quand on pense qu’il a presque 15 ans. Nous essayons de le pousser le plus possible, tout en gardant à l’esprit que notre objectif est de finir, non de gagner. Et si nous devons réduire la voilure pour être plus prudents, nous le ferons.
