Sous le signe de l’été indien
Les premiers jours de la Lorient Horta Solo semblent bénis des dieux. Alors que deux jours plus tôt, la Bretagne semblait noyée dans la grisaille, le prologue du dimanche 31 août s’est déroulé dans des conditions estivales : grand soleil et vent d’ouest 10 à 15 nœuds, mer plate, il y avait tout pour satisfaire des régatiers en mal de confrontation depuis près de deux mois. Avec de tels ingrédients, il fallait un maître cuisinier : le parcours concocté par le Comité de Course a rajouté ce qu’il fallait pour épicer le plat comme il convient.
Ils avaient des fourmis dans la quille. Les solitaires de la Lorient Horta Solo avaient hâte d’en découdre de nouveau depuis leur dernière confrontation au mois de juin, lors de la Solitaire du Figaro. Le prologue disputé dans les coureaux de Groix leur a donné l’opportunité de renouer avec le jeu des réglages fins, des croisements au cordeau, des manœuvres sur le fil.
La flotte attaquait d’entrée par le plat de résistance, un long bord de près qui les menait jusqu’à la bouée Speerbrecker, à quelques encablures de l’entrée de Port-Tudy. C’est Paul Meilhat (SMA) qui virait en tête la bouée cardinale est, suivi de près par son compère Damien Guillou (Solidarité Mutualiste). Suivaient à quelques longueurs Yoann Richomme (Skipper Macif 2014) et Gildas Morvan (Cercle Vert). Le skipper de Landéda, plutôt joueur, tentait de s’infiltrer bâbord amure entre son adversaire et la marque. Cette option osée se terminait par une touchette sans gravité qui obligeait néanmoins Gildas Morvan à réparer sa faute par un 360°, un tour complet sur lui-même. Le temps de reprendre leurs esprits, les deux protagonistes de ce petit duel avaient laissé filer les deux leaders. Dès lors, il y avait bien deux duettistes seuls à l’avant-scène et le gros de la troupe qui s’écharpait gaillardement sous spi le long de l’île de Groix. A la bouée Edouard de Cougy, la messe était quasiment dite pour la victoire finale qui, sauf énorme retournement de situation, ne pouvait plus échapper à l’un des deux leaders. Clin d’œil de l’histoire, les deux navigateurs ont couru sous les mêmes couleurs d’un partenaire local lors du Tour du Finistère et ont préparé en commun la Lorient Horta Solo. Derrière les deux compères, c’est finalement Gildas Morvan qui s’extirpait de la meute et prenait la dernière place du podium.
Révision générale et petits oignons
Qu’ils se soient battus aux avant-postes ou qu’ils aient navigué dans le ventre mou du classement, les solitaires de la Lorient Horta Solo avaient tous des motifs de satisfaction. Tous ont pu constater que les écarts restent infimes, témoignage du haut niveau acquis au fil des épreuves du circuit Figaro Bénéteau. Les conditions idéales du prologue, l’absence de casse ont aussi contribué à la bonne humeur ambiante. Certains à l’instar d’un Gwénolé Gahinet (Safran Guy Cotten) combattif ont pu constater que leur vitesse leur permettait de grappiller des places. D’autres comme Isabelle Joschke (Generali Horizon Mixité) se consolaient en mesurant combien des exercices comme la bataille de chiffonniers entre trois bouées et le marathon d’une semaine de course au large n’avaient finalement que peu de rapports. Pour Milan Kolacek (Bohemia Praha) ce prologue était aussi la découverte des exigences d’un circuit monotype qui ne laisse que peu de place au hasard.
Mais ce qui fait aussi la qualité d’une épreuve, c’est sa faculté à trouver un style. Pour cette première édition de la Lorient Horta Solo, la marque de fabrique semble bien être l’attention particulière portée aux coureurs, de même qu’un certain état d’esprit empreint de convivialité et de refus de prendre les choses de haut. Du brunch offert aux concurrents avant de partir sur l’eau, à la visite organisée de la base de Lann Bihoué à l’occasion du briefing sécurité, Lorient Grand Large imprime sa marque. Et il y a fort à parier que les Açoriens vont rivaliser de gentillesse et de soins. Pour sa première édition, la Lorient Horta Solo pourrait rapidement faire école.
Ils ont dit
Paul Meilhat (SMA) :
[quote]La tradition qui voulait qu’il ne fallait pas gagner le prologue est en train d’être battue en brèche. Jérémie Beyou a bien remporté celui de la Solitaire du Figaro. C’est toujours agréable de constater qu’on est dans le match, de faire un signe aux copains, leur dire qu’il faudra compter sur moi. Le bateau est impeccable, j’ai tout de suite retrouvé mes marques, c’est parfait.[/quote]
Damien Guillou (Solidarité Mutualiste)
[quote]C’est vraiment rigolo d’avoir été deux à mener la course comme çà. Avec Paul, on s’est préparé ensemble, on a vraiment partagé beaucoup. On a eu la chance de pouvoir s’échapper devant Groix. Derrière, les autres se gênaient mutuellement et on en a profité. C’est toujours ça de pris, même si on sait que ce n’est qu’un prologue.[/quote]
Gildas Morvan (Cercle Vert) :
[quote]J’ai été un peu trop joueur avec Yoann Richomme au passage devant Port-Tudy. Mais c’est aussi là qu’on reprend nos repères, qu’on essaye d’évaluer ce qu’il est possible de faire ou ne pas faire. Après, c’est évident qu’il ne faut pas reproduire ce genre d’erreur quand on sera réellement en course. Mais là, on avait des conditions idéales, l’envie de batailler… Ce qui est bien, c’est d’avoir pu constater que la vitesse était là, c’est le plus important.[/quote]