Tous derrière et lui devant…

© Alexis Courcoux

Chef de meute depuis la latitude de Gibraltar, Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de La Mer) s’est emparé ce matin de la tête du classement général. Une trajectoire parfaite minimisant les empannages, une expérience bien trempée sur l’échiquier de l’Atlantique (il compte 10 transats en solitaire et en double !) ; tous les atouts sont dans la poche de celui que ses potes appellent Erwan T. pour que cette Transat Bretagne-Martinique soit la sienne… Mais ne préjugeons de rien, car la course est loin d’être terminée. Une erreur de pilotage est vite arrivée. Car c’est bien de pilotage dont il s’agit aujourd’hui : les solitaires déboulent à plus de 10 noeuds dans les alizés, bien calés dans leurs sièges baquet, le stick dans une main, le winch d’écoute de spi à portée de l’autre. Programme jusqu’à l’arrivée : une course d’endurance longue de 2 200 milles…

Au-revoir l’Afrique, bonjour La Martinique. Le gros de la flotte fait désormais route vers l’arc antillais après son grand détour par l’est. Sauf Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste) et Arnaud Godart-Philippe (Régates Sénonaises), toujours scotchés au nord de l’anticyclone en travers de la route directe. Ils doivent ronger leurs écoutes de dépit et d’impatience. Leur avance au classement commence à fondre comme neige au soleil : les petits camarades filent deux fois plus vite qu’eux dans les alizés dans la bonne direction. Mais la suite promet d’être passionnante : dès demain, les deux « Lonesome Cowboys » vont pouvoir raccrocher aux wagons. Suspense quant à leur positionnement…
Tribord amures pendant 4 à 5 jours, voilà le menu au sud de l’anticyclone ! Pas de choix tactiques, ni de stratégies à court terme, l’heure est à l’optimisation de la vitesse du bateau et à la gestion des grains. Les nuits risquent d’être agitées pour les marins, car c’est là que le vent peut passer d’un coup d’un seul de 15 à 35 nœuds.
« Très sincèrement, je ne regarde pas trop les autres bateaux, je fais ma route » indiquait Erwan Tabarly à la vacation du jour. Il fait bien, car dans son tableau arrière, les marins attaquent. Gildas Morvan (Cercle Vert) et Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) ne sont pas là pour enfiler des perles, mais plutôt pour profiter des petites bascules de vent et des décalages possibles. Le géant de Landéda, au dernier classement, pointe d’ailleurs un peu au-dessus de la route d’Erwan avec une meilleure vitesse. Sur 2 200 milles, chaque petit mille grappillé peut faire la différence. C’est ce que disait Adrien Hardy (Agir Recouvrement) à la vacation : « J’ai repris 2/3 milles en 24 heures à Yoann (Richomme sur DLBC – Module Création, ndlr), c’est une vraie satisfaction, même si ce n’est pas grand-chose, c’est déjà pas mal. » Un décalage vers l’ouest se créé également à l’arrière de la flotte à partir d’Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) jusqu’à Corentin Horeau (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir). Le vent est maître du jeu, aux skippers d’en tirer le meilleur parti à la barre et à la table à cartes.
Pendant ce temps-là, Eric Baray (Tektôn – AGM/Région Martinique) vient de laisser passer sa chance : il se fait enfermer par la dorsale anticyclonique et pointe à 2 nœuds à 50 milles de Lanzarote. Les îles se font toujours désirer…

Les cinq premiers à 16 h

  1. Armor Lux – Comptoir de la Mer (Erwan Tabarly) à 2 210 milles de l’arrivée
  2. Régates Sénonaises (Arnaud Godart-Philippe) à 37,64 milles
  3. La Solidarité Mutualiste (Damien Guillou) à 48,64 milles
  4. Cercle Vert (Gildas Morvan) à 50,95 milles
  5. Skipper Macif 2012 (Fabien Delahaye) à 76,36 milles…

Ils ont dit :

Arnaud Godart Philippe (Régates Sénonaises)

J’espère que ça va rentrer et que j’aurais 10-15 nœuds. Concernant mes réparations dans la grand-voile, là nous sommes au portant donc c’est sauvé. Les patchs kevlar tiennent bien, ceux que j’avais collés se sont décollés, même les cagnards que j’avais utilisés. J’en ai sauvé un pour l’arrivée. Il a fallu que je surcouche pas mal pour que ça tienne jusqu’au bout. J’avoue que j’ai du mal à dormir car j’ai mal. Il y a de fortes de chances pour que ma côte soit cassée. Là au portant c’est plus calme mais le temps est long. Je fais attention quand je manœuvre je ne suis pas en mode « Figaro », je fais attention à moi. J’ai essayé de monter dans le mât hier (drisse cassée) mais j’ai fait demi-tour car je ne peux pas le faire même dans des conditions clémentes.

Yoann Richomme (DLBC Module – Création)

Je ne suis plus du tout solitaire car je suis accompagné par 50 dauphins. Il y a 18 nœuds de vent, il y a un grand soleil et un peu de nuages qui se sont formés pendant la nuit, ce qui peut annoncer des grains. Les grains sont très actifs, il pleut et ils sont venteux, ça rentre entre 22h et 4h du matin donc ce sont de moches nuits. Ce sont des orages et le vent va de 15 à 35 nœuds. Il y a donc des risques de déchirer les voiles et de casser le matériel. Il faut donc surveiller.

Adrien Hardy (Agir Recouvrement)

Ça se passe bien comme hier matin ! C’est à peu près les même conditions, entre 15 et 20 nœuds de vent, la mer est plus rangée qu’hier, le bateau glisse plus facilement, c’est possible de le laisser sous pilote. C’est plus agréable. Je viens de regarder mes classements et de récupérer la météo. Ca glisse bien, on est sous pilote. Je suis content car c’est la première fois depuis deux jours que j’ai regagné sur Yoann. La météo s’annonce bien, l’alizé va prendre de la puissance. On va accélérer au fur et à mesure. On a encore 3 jours comme ça avec des conditions assez maniables et après ça va être assez tonique avec pas mal de barre et des vitesses qui vont augmenter.

Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance)

Pour les options, c’est assez compliqué pour le moment. A part du décalage en latéral pour passer derrière les copains, il n’y a pas grand-chose. Jusqu’au 3 avril on sera sur un bord de tribord. Je barre plus qu’avant car il faut attaquer, c’est un peu une ligne droite donc ce n’est pas les options qui font gagner ou perdre du terrain, c’est plus la vitesse du bateau. C’est un peu dur de barrer autant, c’est un peu monotone, il n’y a pas de changement, mais faut se forcer, faut se faire mal un peu. Il ne va pas y avoir beaucoup de jeu il va falloir caler les bons empannages, ce n’est pas non plus des conditions très compliquées. Je crois qu’Erwan Tabarly doit stresser mais ce n’est pas non plus catastrophique pour lui.

Simon Troël (Les Recycleurs Bretons)

La question du jour c’est « est-ce que nos amis du Nord vont recroiser ? » j’en doute. J’ai regardé mais je n’y crois pas, on verra bien demain. J’ai lancé des routages, à priori on est devant mais la question c’est « est-ce qu’ils ont du vent ? » Alors est-ce qu’on leur colle 30 ou 50 milles ? Ca dépend du pourcentage de vent que l’on rentre dans les routages. Hier, j’ai passé 2 heures voire 2 heures et demie à la table à cartes. Hier c’était un peu délicat entre l’anticyclone d’un côté, et de l’autre la côte, donc il fallait réfléchir. Là, il commence à y avoir un peu de mer donc il y a moyen de gagner encore un peu aujourd’hui.

Source

Rivacom

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