Laurent Pagès – Sur cette étape, nous n’avons pas raté grand chose

© Stefan Coppers/Team Brunel/Volvo Ocean Race

Il est le Français de Team Brunel. Engagé aux côtés de Bouwe Bekking, le vétéran de la Volvo Ocean Race avec 6 participations précédentes, Laurent Pagès vient donc de remporter la deuxième étape de ce tour du monde. Il revient sur un parcours Le Cap – Abu Dhabi qui s’est parfaitement déroulé.
Un récit sans accroc à l’image de ce qu’a vécu l’équipage hollandais pendant ces 5 200 milles de course.

Finalement, cette étape que tu appréhendais sur le plan météo, s’est bien passée pour Team Brunel ?

C’est vrai, cette étape ne me plaisait pas trop sur le papier. Finalement, son profil a été très différent de ce que l’on pouvait imaginer. Avec Abu Dhabi Ocean Race et Dongfeng Race Team, nous avons eu du vent en permanence et globalement plus fort que ce qui était annoncé par les fichiers. Donc nous n’avons pas été soumis exclusivement aux aléas des nuages qui passent. Et puis, il faut avouer que c’était super sympa d’être au contact des autres en permanence. Nous avons été plusieurs fois bord à bord, notamment avec Dongfeng. C’est stimulant, c’est ce que l’on aime.

Que change la monotypie dans la gestion de la course ?

Sur la Volvo Ocean Race précédente, nous n’étions pas encore en monotypie mais quatre ou cinq bateaux étaient vraiment proches en performance. Sur celle d’avant, il y avait par contre de vraies différences. Par exemple, Ericsson et Green Dragon n’étaient pas du tout les mêmes bateaux donc cela générait des différentiels importants dans certaines conditions voire un comportement différent de l’équipage par rapport à aujourd’hui. Ici, l’écart de vitesse est tellement infime… 0,1 nœuds parfois sur certaines moyennes. Et puis, avec l’AIS, nous savons en permanence où sont nos concurrents, quel est leur cap et quelle est leur vitesse. On voit constamment si on gagne ou si on perd par rapport aux autres. C’est comme si tu étais noté en permanence. Tu sais si tu as le bon rythme ou pas, si tu es bien toilé, … Cela met de la pression dans certains cas mais aussi de l’entrain dans certaines situations. Disons que c’est un jugement instantané en permanence sachant que l’AIS fonctionne jusqu’à 10 milles nautiques.

L’attention a été mise pour obtenir un groupe composé de personnes qui vivent sereinement ensemble.

Est-ce que l’ambiance à bord est toujours aussi bonne ?

L’ambiance à bord et l’état d’esprit étaient déjà excellents au Cap. Donc, forcément, cela va toujours bien. Mais une fois encore, je le répète volontiers, cela fait partie de l’ADN de notre équipage. L’attention a été mise, dans la construction de cette équipe, pour obtenir un groupe composé de personnes qui vivent sereinement ensemble. Cela dit, nous n’avons pas encore eu à faire face à une difficulté majeure. Et ce serait étonnant de ne pas se retrouver dans cette situation avant la fin de la Volvo Ocean Race. Mais je pense que ce groupe là, peut répondre efficacement à une situation compliquée. C’est un groupe très sain, qui se respecte beaucoup et qui est solide psychologiquement. Il est capable de mettre en perspective ce que représente cette course sur la longueur et donc de prendre le recul nécessaire face à une victoire d’étape.

Après deux étapes, que peux-tu nous dire sur ton rôle à bord et ta relation privilégiée avec Bouwe Bekking ?

Mon fond de commerce, ma mission première dans cet équipage est d’être le leader technique pour que le bateau aille vite. J’aime faire ça. Et je crois que l’expérience accumulée sur la Volvo ou sur d’autres supports me donne un bagage intéressant pour ce rôle. J’essaye d’avoir une approche structurée, réfléchie. D’autres sont plus intuitifs et on se complète bien. On combine la réflexion et le ressenti. Je barre aussi beaucoup et je suis bien content car j’aime aussi ça. Et puis, Bouwe me demande de temps en temps mon avis. Pas forcément sur la stratégie car son association avec Andrew Cape fonctionne très bien. Ils font des merveilles ! Mais sur des situations plus ponctuelles comme dans les phases de contact où le positionnement devient encore plus important. C’est une prise d’info sur le moment et cela signifie qu’à bord de Brunel, on s’intéresse aux avis des autres. C’est vraiment à l’image de cet équipage.

A t’écouter, il semble que vous n’ayez rencontré aucune difficulté pendant ces 24 jours de mer ?

Des difficultés sur cette étape ? Je réfléchis mais non… Sur la première étape, nous avions eu des frustrations comme à la fin de l’Atlantique Sud quand on s’est retrouvé à l’extérieur d’une bascule. On n’a pas eu la pression que l’on espérait et on s’est retrouvé spectateurs avec les autres qui nous ont doublés. C’est le jeu, on ne peut pas avoir raison tout le temps ! D’ailleurs en voile, le vainqueur est celui qui a fait le moins d’erreurs. Mais cette fois, nous n’avons pas rencontré de vraies difficultés sauf bien sûr l’environnement météo qui n’était pas toujours facile. Globalement, on s’en est bien sorti même dans les deux passages du pot au noir. Allez juste une fois on s’est retrouvé un peu piégés. Nous étions sous code zéro avec 8 nœuds de vent et puis, sous un grain, c’est monté. 13 nœuds puis tout à coup 25 ! Cela a été une petite situation de stress où il a fallu sortir les gars de leur bannette pour aider à rouler le code zéro. Dans ce cas-là, si tu n’as pas un groupe soudé, ca peut être compliqué. Si un type te dit « Eh les gars, mais qu’est ce que vous faites sous code zéro avec 25 nœuds ? ». Mais là, tout s’est très bien passé. Globalement, sur cette étape, nous n’avons pas raté grand-chose. Non, je ne vois pas… Pas de nuages à l’horizon.

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