Grand tour d’horizon avec Vincent Riou

© Benoit Stichelbaut / PRB

Il est l’un des grands favoris de cette Route du Rhum – Destination Guadeloupe. A quatre jours du départ, Vincent Riou affiche une incroyable sérénité. Footing quotidien, travail sur la météo, présence auprès de ses partenaires, rendez-vous avec les médias… Le skipper de PRB prend visiblement un grand plaisir dans ce programme d’avant-course. Il profite des ces derniers moments à terre avec la volonté d’être disponible pour toutes les sollicitations inhérentes au départ de l’un des plus beaux rendez-vous de voile au monde. Il est d’ailleurs l’un des seuls skippers à ne pas avoir quitté Saint-Malo depuis vendredi dernier. C’est une manière d’entrer dans la course, dans sa course. Le bateau est prêt, l’homme est affûté. Il nous parle de son état d’esprit pour aborder cette Route du Rhum qui lui tend les bras. Il nous raconte sa préparation. Il détaille avec précision les atouts de ses principaux adversaires et nous transmet son envie d’inscrire son nom au palmarès de cette transat éternelle. Entretien sans langue de bois et avec vue sur mer.

Dans quel état d’esprit es-tu à 4 jours du départ ?

Cela se passe bien, je crois. Les conditions sont idéales car toutes les opérations que l’on doit réaliser en amont de la course se déroulent bien. Nous avons une météo d’enfer, ce qui facilite le tout. Tout va bien aussi parce que le bateau est prêt, il n’y a pas d’inconnue technique à gérer, de stress particulier, il y a juste à s’organiser pour finir la fin de la semaine. Mon programme est bien calé, il n’y a pas d’imprévu qui viendrait perturber ma préparation et mon repos.

Tu as beaucoup navigué entre les stages d’entraînement organisés par le Pôle Finistère Course au Large et tes navigations propres, c’était une vraie volonté d’accumuler les milles après le chantier de cet hiver ?

Nous avons réussi à avoir un bon volume de navigation, mais c’est certain que nous aurions pu en faire plus. Après, le problème est que lorsque l’on met le bateau à l’eau en juillet comme ce qui a été le cas cet été, nous ne sommes opérationnels qu’en août. Et si ensuite on se met une trop grosse charge de travail en septembre-octobre, c’est un coup à arriver à genoux sur le départ de la Route du Rhum. En plus, la préparation à la navigation en solitaire te prend beaucoup d’énergie à chaque entraînement. Je pense que nous avons trouvé le bon équilibre, que ce soit en analyse de performance, en validation des travaux et en entraînement pur et dur. Je suis plutôt satisfait. Nous aurions pu en faire plus mais il y avait quand même le risque que ce soit contre productif.

Comment qualifierais-tu cette Route du Rhum ?

Cette transatlantique sera un vrai run à travers l’Atlantique, de 10-12 jours. Cela risque d’être super intense. Aujourd’hui le niveau est tellement homogène en tête de flotte qu’il va falloir chercher loin dans ses ressources si on veut espérer l’emporter. Ça va être certainement engagé.
On connait bien les performances de nos bateaux. Il va falloir être rapide tout le temps, et cela va demander beaucoup de disponibilités. Mais par contre, si nous avons une bonne météo, nous traverserons assez vite.

Quelles sont les qualités qui peuvent faire la différence sur cette course ?

Cela dépendra de la météo qui nous sera proposée. Si on finit sur une route nord casse-bateau, il faudra savoir faire une belle trajectoire, bien préserver son bateau, et avoir quand même un peu de réussite. Si on est sur une route plus directe, très rapide, clairement, il faudra être à fond tout le temps, avoir un bateau rapide pour l’emporter. Aujourd’hui, on ne sait pas à quelle sauce on va être mangé. La vie à bord des bateaux peut être vraiment très très différente en fonction de la météo.

Est-ce un gros atout d’avoir beaucoup navigué en entrainement avec des adversaires comme François Gabart ou Jérémie Beyou ?

L’entrainement collectif permet de tirer le groupe vers le haut. Nous n’aurions jamais eu ce niveau si nous n’avions pas navigué ensemble. Cela nous permet aussi de connaitre les forces et faiblesses de nos concurrents. Ce n’est pas une mauvaise chose. Mais une transat en solitaire repose surtout sur les hommes. Donc même si on connaît les capacités de nos concurrents, il va falloir aller au-delà. C’est là le vrai défi.

Quelles sont les forces de tes principaux adversaires ?

Ce sont des marins qui ont un gros niveau de confiance. Ils ont confiance en ce qu’ils font, ils ont confiance en leurs options et ils sont capables de naviguer tout seul. C’est la qualité qu’ont tous les grands champions.
Techniquement, François Gabart a vraiment un bateau très rapide, qu’il connaît bien. Jérémie Beyou a un bateau un tout petit peu moins rapide, vraiment un tout petit peu. Il connaît moins bien son support. Mais c’est normal puisqu’avec François nous avons le bateau depuis 3-4 ans alors que Jérémie a le sien depuis l’année dernière. Il le découvre petit à petit.
François comme moi, nous nous sommes donnés cette année l’IMOCA comme objectif principal. Jérémie, lui, a quand même participé à deux Solitaires du Figaro. Tout le temps qu’il a passé à faire ça, il ne l’a pas passé à naviguer en 60’. Ça n’empêche que c’est un concurrent redoutable parce qu’il régate super bien entre autre grâce au figaro et qu’il a confiance en lui. Ils sont dangereux tous les deux, différemment, mais dangereux.
Safran c’est différent. Marc Guillemot a navigué dans son coin cette année. Le bateau du groupe Safran n’a par ailleurs pas évolué depuis un moment car il a remis sa vieille quille suite à son avarie sur le Vendée Globe. Depuis, nous n’avons pas trop vu de grandes nouveautés sur son bateau. Et ensuite, l’autre inconnue, est de savoir si Marc sera capable de suivre le niveau d’engagement qu’il risque d’y avoir dans cette transat. Parce qu’il a quand même certes plus d’expérience que les autres, mais il y a les années qui vont avec l’expérience. Et l’IMOCA, c’est clairement très engagé physiquement.

Qui, dans l’ensemble de la flotte retient particulièrement ton attention ?

Jean Galfione sans hésiter ! Son projet est plus qu’intéressant, il est courageux. Il est courageux de se lancer dans la voile. Faire la coupe, c’était déjà un vrai virage, mais de là à aller sur une discipline qui t’amène à une autonomie complète comme la voile en solitaire sans routage, il y a quand même un bon. Il a pris le temps de s’y préparer certes, mais je trouve qu’il a beaucoup de courage. Je souhaite qu’il arrive de l’autre côté et qu’il passe un bon moment en mer même si ce n’est pas forcément simple. Il s’est donné les moyens d’y arriver.

As-tu déjà été tenté par l’idée de changer de sport ?

Non, honnêtement non. Déjà il y a les sports athlétiques qu’il faut pratiquer dès le plus jeune âge pour être vraiment performant. Ensuite, il y a pleins de sports mécaniques vers lesquels tu peux bifurquer. Mais si j’arrivais déjà à faire tout ce que j’ai envie de faire en voile, ça serait déjà pas mal. C’est un sport où des tas de disciplines se croisent et c’est un sport passionnant à pratiquer. C’est peut-être l’une des raisons pour laquelle je n’ai jamais eu envie d’aller vers autre chose.

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Mis à l'eau le: 29 octobre 2014

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